Critique – Price – Steve Tesich
L’adolescence est bien souvent le moment des dilemmes. Daniel Price, 18 ans, est en terminale. Il est à quelques semaines de décrocher le diplôme qui le fera entrer dans l’âge adulte. En attendant, il se balade avec ses deux amis : Larry, le fort en gueule prêt à en découdre avec ceux qui le contrarient, et Billy, le bon garçon. Lorsqu’il rencontre Rachel, une insaisissable personne qui vit avec son père, Daniel s’éveille à l’amour, un sentiment ignoré jusqu’à présent. Va-t-il privilégier l’amour ou l’amitié ?
Pendant ce temps, son père agonise d’un cancer et ne cesse de culpabiliser son fils, lui reprochant de l’abandonner. Là encore, il sera confronté à un choix cornélien : sa famille ou son amoureuse. Même son avenir est soumis à deux alternatives : rester à East Chicago et travailler à l’usine qui détruit la santé des habitants de la ville ou prendre la poudre d’escampette et aller voir ailleurs si la vie est plus belle.
Mais à force de se poser des questions, ne passe-t-il pas à côté de son existence ? Roman d’apprentissage, « Price » est un livre bouleversant, profondément et désespérément triste.
« Price » a été publié aux Etats-Unis en 1982. C’est le premier roman de Steve Tesisch, écrivain d’origine serbe. Le magnifique « Karoo » est sorti en 1998 dans son pays et en 2012 en France. L’écrivain est mort en 1996.
EXTRAITS
- « C’était fini l’époque où je croyais que soit on aimait quelqu’un, soit on ne l’aimait pas. Le monde ne fonctionnait pas comme ça, tout était question de nuances; l’amour, la liberté, absolument tout. Une vérité à laquelle je ne m’étais pas encore totalement habitué. »
- « Je m’agrippais à mon chagrin, et ce faisant, je ne voulais pas lâcher Rachel. J’aurais sans doute pu me libérer d’elle en laissant ma douleur s’envoler. Mais par cette nuit de tempête glaciale, nulle liberté ne m’attirait. Je songeais, malgré tout, à la proposition muette de Rachel. Je voyais un nouveau destin prendre forme : je pleurerais à jamais mon premier amour, qui aurait pu s’épanouir mais que j’avais fini par perdre définitivement. Je me voyais y consacrer le reste de ma vie. Ce serait une sorte d’occupation, une émotion sécurisante, une orbite fixe. La liberté? Aucun intérêt. C’etait une feuille emportée par le vent, alors que moi, je voulais être relié à quelque chose, à quelqu’un. L’idée meme d’une vie entière de liberté m’angoissait terriblement. »
- « Jusqu’à quel âge on a encore toute sa vie devant soi ? Où est la limite ? Je me rappelle quand j’étais au lycée, on me disait tout le temps que j’avais toute la vie devant moi. Et puis on a cessé de me le dire. »
- « -Ecoute, Daniel, dit-elle doucement, pourquoi vivre un malentendu alors que nous pouvons vivre une tragédie ? »
- « Mon passé semblait-il s’était évaporé. Je m’efforçais de survivre au présent. Et tout ce que j’avais, c’était mon avenir, et celui-ci était aux mains d’une fille que j’aimais mais que je ne connaissais pas vraiment. Ma vie et mon identité m’avaient échappée. »
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