Critique – Les riches heures – Claire Gallen
Cergy, un appartement minable dans lequel vivent Gaëtan et Anna. Pourtant, le couple a connu des « riches heures ». Commercial dans la promotion immobilière, Gaëtan a gagné beaucoup d’argent en vendant des appartements défiscalisés à des gogos soucieux d’alléger leurs feuilles d’impôts.
Mais la pléthore de logements ne trouvant pas acquéreur fait exploser ce système peu moral mais parfaitement légal.
Alors que Gaëtan quitte le bateau avant qu’il ne coule, son patron Christophe risque gros.
Mais il ne ressent aucune culpabilité, ni celle d’avoir arnaqué des pigeons, ni celle d’avoir lâché son chef. Il est juste un peu déçu de ne plus pouvoir assurer à sa femme, la petite fille de riches, leur ancien train de vie : appartement dans le 17ème, Audi, vacances lointaines…
Dans un dernier baroud d’honneur, le couple décide de s’offrir un dernier séjour au soleil. Mais la destination – le Lavandou – n’a pas de quoi faire rêver. D’autant plus que le 2 pièces qu’ils louent est du genre misérable.
Résultat, le couple part à vau-l’eau. Est-ce le manque d’argent qui précipite Gaëtan et Anna vers une rupture qu’on imagine inévitable ? En partie. C’est surtout, je pense, l’accident qui va tout chambouler. Alors que son épouse dort dans l’Opel Astra qui les emmène vers le Sud, Gaëtan découvre un accident de la circulation effroyable.
Il entend des gémissements de bête à l’agonie et croise le regard d’une petite fille blessée. Mais il ne s’arrête pas. Sa vision va le hanter, provoquant sa descente aux enfers. Pourtant, Gaëtan aurait voulu être un homme bien. Peut-être le deviendra-t-il.
Premier roman d’une journaliste à l’AFP, « Les riches heures » est un livre qui vous prend aux tripes (cf. la scène de l’accident). Il nous parle bien sûr de notre époque où l’argent-roi fait perdre tout repère, du délitement d’un couple basé sur la réussite financière mais aussi de la culpabilité et de la rédemption.
Particulièrement méprisable au début, le personnage de Gaëtan prend de l’épaisseur psychologique et nous ressentons une certaine empathie pour lui.
En plus, le style est agréable, moderne, fluide, lapidaire.
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