Critique – L’écuyer mirobolant – Jérôme Garcin

Critique – L’écuyer mirobolant – Jérôme Garcin


Etienne Beudant (1863-1949) est, pour le commun des mortels, un inconnu.

Pour les amoureux des chevaux, et plus particulièrement de l’équitation légère, il est l’un des maîtres du dressage français. Toute sa vie, il appliqua à la lettre le précepte de Baucher, son inspirateur : « mains sans jambes, jambes sans mains ». Il fut célèbre, dans le milieu de l’équitation, pour son galop arrière. Pour lui rendre hommage, Jérôme Garcin, qui excelle dans le récit équestre (« La chute de cheval », « Bartabas roman », « Cavalier seul »), a donné comme titre à son dernier roman le surnom – « l’écuyer mirobolant » – que le général Decarpentry, lui aussi grand cavalier, attribuait à Beudant.

L’histoire commence par l’enterrement de l’écuyer, modeste militaire qui servit en Algérie et au Maroc, ses plus belles années, celles où il se frotta aux corps des barbes et autres pur-sans arabes mais aussi à ceux des femmes sensuelles de la Méditerranée, lui qui est né dans le froid parisien.

Il retourne en France le corps meutri par trop d’heures passées en selle. Malgré ses souffrances, il continue inlassablement à métamorphoser les chevaux les plus rétifs en destriers dociles et élégants.

Alors qu’il s ‘étiole de plus en plus, il rencontre Vallerine, une belle jument racée, le grand amour de sa vie, sa femme et son fils ne comprenant pas la passion d’Etienne pour les chevaux.

Sans renoncer aux descriptions techniques propres à l’art équestre, Jérôme Garcin nous entraîne avec exaltation et dans un style classique et épuré dans l’univers d’Etienne Beudant. Peut-être est-ce parce que cet « écuyer mirobolant » avait une philosophie de la vie ? Sur sa tombe, on trouve en effet l’épitaphe suivante : « pour arriver vite, aller très lentement mais assurer chacun de ses pas »…

Extrait : « en cédant Vallerine, il tirait un trait définitif sur son histoire avec les chevaux. Il n’aurait désormais plus de raisons de monter. Il se coucherait pour toujours, comme font les vieilles haridelles qui s’éloignent des humains pour aller s’étendre sur le flanc au fond d’un pré, n’ont même plus la force de chasser les mouches ni d’avoir peur des prédateurs, étirent leur longue tête osseuse dans l’herbe douce et ferment les yeux ». Personne ne peut être insensible à cette image de la fin d’un être vivant dont on dit qu’il est la

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