Critique – La fin du monde a du retard – J-M. Erre
Alice et Julius ont deux points communs : être internés dans une clinique psychiatrique et être amnésiques.
Alice a la particularité d’être la seule rescapée de l’incendie de la salle des fêtes qui accueillait son mariage. Depuis, elle est atteinte du syndrome de Klüver-Bucy qui l’empêche de ressentir la moindre émotion.
Julius est, lui, persuadé d’être l’Elu chargé de révéler au grand jour les agissements de Tiresias, une société secrète à la tête d’un vaste complot mondial.
Persuadé d’être recherché par les sbires de l’organisation, il fuit l’établissement médical emmenant avec lui Alice, dont il vient de tomber amoureux.
Commence alors une course-poursuite peuplée de personnages secondaires aussi « haut en couleur » les uns que les autres. On peut citer le commissaire Gaboriau qui attend la retraite prochaine en dévorant du Cioran ainsi que son adjoint qui se moque de son vieux patron, soulignant ainsi le fossé entre les générations. Sans oublier un pigeon kamikaze !
Comique de situation, dialogues cocasses, humour à toutes les pages (parfois un peu lourd : « Mon royaume pour une matraque ! »), « La fin du monde a du retard » est un roman déjanté à l’imagination débordante qui, mine de rien, dézingue tous les travers de nos sociétés et, notamment, tous ceux qui, avec ostentation, sont pour ou contre sans avoir l’intelligence du discernement et de la mesure : ceux qui croient aux complots et ceux qui prennent pour pain bénit ce que les médias nous racontent, ceux qui sont pour une réforme de l’orthographe et ceux qui y sont opposés, ceux qui souhaitent que la pratique religieuse s’adaptent aux évolutions de nos mœurs et ceux qui sont pour la messe en latin, ceux qui pensent que la révolution de Mai 68 a fait le lit de notre crise morale et ceux qui pensent qu’elle a eu un effet libérateur salvateur, ceux qui aiment la bonne chère bien grasse et ceux qui prônent la consommation de cinq fruits et légumes…
Cette critique, habilement truffée de références populaires (« Star Wars », « Da Vinci Code »…) et classiques (Platon, Cervantés…), fait de ce roman autre chose qu’une joyeuse rigolade. Car il y a beaucoup de vrai dans ce que nous raconte J-M. Erre qui conclut son livre par une pirouette qui nous laisse pantois.
Du même auteur, j’ai déjà lu « Le mystère Sherlock Holmes » et « Made un China ».
Ce roman fait partie de la sélection du Prix des lecteurs de la Ville de Brive 2014.
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