Critique – La cache – Christophe Boltanski
Comment une maison peut-elle autant influer sur la vie de ses habitants ? C’est un peu le défi que l’auteur s’est fixé en s’appuyant sur les différentes pièces de la demeure familiale pour raconter l’histoire des siens.
Tout commence par une scène cocasse où trois générations se retrouvent entassées dans la Fiat 500 pour parcourir des milliers de kilomètres. Mais ils sont rares les moments où les Boltanski s’enivrent de grands espaces. La plupart du temps, ils restent confinés « Rue-de-Grenelle », dormant tous dans la même pièce, couvée par Myriam la matriochka autoritaire abandonnée par sa famille biologique et handicapée (elle baptisa ses béquilles ses « petits croquemorts »). L’agencement des espaces est adapté à l’infirmité de « Grand-Maman » qui se déplace difficilement et a besoin de s’appuyer sur ses enfants et petits-enfants pour se mouvoir. A ses côtés, son mari Etienne, un homme marqué par la guerre de 14 et l’antisémitisme de la France de Vichy qui l’obligea à s’enterrer dans un « entre-deux », une cache qui donne le titre à ce joli roman autobiographique. Ces deux-là ont eu une descendance remarquable avec le linguiste Jean-Elie qui « écoute » « Mezzo » sans le son (!), le plasticien Christian et le sociologue Luc.
Malgré la caractère fusionnel qui unit tous ses êtres qui forment une sorte de « kibboutz familial », on ne parle jamais de la Shoah. Peut-être une forme de dignité ou une volonté d’oublier l’indicible.
Dans une belle écriture et souvent avec humour, Christophe, le fils de Luc, rend hommage à cette dynastie d’intellectuels fantasque, aimante et un peu étouffante pour laquelle le quotidien, y compris s’alimenter, n’a pas d’importance. Seuls comptent les sentiments pour les siens et les nourritures de l’esprit.
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