Critique – Si rude soit le début – Javier Marias – Gallimard
Madrid, 1980. Le caudillo est mort cinq ans plus tôt. La movida libère les Espagnols du carcan de plus de 35 ans de dictature et la jeunesse goûte au plaisir du sexe et des drogues.
Juan de Vere, la vingtaine, devient le secrétaire privé d’Eduardo Muriel, un célèbre réalisateur et scénariste de films. Il est fasciné par le personnage ainsi que par celui de sa femme Beatriz que son mari maltraite. Le secret de la mésentente du couple se double d’un autre mystère, celui du docteur Van Vechten, un homme énigmatique et malsain.
Tout en déroulant le fil de sa jeunesse, Juan va se transformer en détective pour résoudre ces deux énigmes.
Dans un style labyrinthique fait de longues phrases pleines de charme décrivant avec précision les relations entre les êtres même les plus sordides, ce roman de l’intime qui emprunte son titre à une citation de Shakespeare (« Si rude soit le début, le pire reste derrière nous ») est un récit d’apprentissage avec, en toile de fond, l’ombre du franquisme dont l’Espagne n’a pas tourné la page.
Dans ces années, on passe en effet en toute impunité du franquisme à l’antifranquisme « grâce » à la loi d’amnistie votée en 1977.
EXTRAITS
- Ce qui n’a pas de sens, c’est qu’il m’éloigne de lui, même si je ne suis que son ombre. Peu m’importent les autres. Je préfère la pâleur de ce mort ambulant à toutes les couleurs du monde. Je préfère languir et mourir dans sa pâleur, plutôt que vivre à la lumière de tous les vivants.
- Ce n’est qu’une fois que nous avons hoché la tête et haussé les épaules que le pire sera derrière nous, parce qu’au moins il sera déjà passé. Et ainsi le mal ne fait que commencer, le mal qui n’est pas encore arrivé.
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