Critique – A l’ombre des jeunes filles en fleurs – Marcel Proust – Gallimard

Critique – A l’ombre des jeunes filles en fleurs – Marcel Proust – Gallimard


C’est à Paris que s’ouvre la première partie, qui en compte deux, du deuxième volume de « La Recherche ».

Bien que ses parents ne fréquentent plus leur « ami » Charles Swann en raison de son mariage avec la « cocotte » Odette, le narrateur est irrémédiablement attiré par celle-ci. Et il profite de sa relation bientôt moribonde avec Gilberte pour pénétrer l’univers de sa mère.

Dans la partie « Autour de Mme Swann », le narrateur confirme son envie de « faire de la littérature » comme le dirait son père. Mais l’hypersensible pleure de rage, persuadé qu’il n’a aucun talent. Il se console à l’idée d’aller voir bientôt la Barma, immense tragédienne inspirée de Sarah Bernhardt. Comme toujours chez lui, il est déçu. Parce que son désir, attisé par une imagination débordante, est trop fort pour qu’il ne soit pas frustré.

Comme il l’a fait dans « Du côté de Guermantes », l’auteur use de métaphores élaborées et souvent drôles qui ont pour objectif de magnifier le réel, de rendre sublime la réalité la plus triviale. Un exemple : il compare Françoise, la servante, à Michel-Ange choisissant « les blocs de marbre les plus parfaits » lorsqu’elle sélectionne les plus beaux ingrédients pour concocter son bœuf en gelée.

C’est la magie de l’écriture proustienne qui digresse en parallèle sur l’amour et ses variations : l’amour défunt de Swann pour sa femme ou encore l’amour que le narrateur éprouve pour les jeunes filles en fleurs qu’il rencontre à Balbec, station balnéaire inspiré de Cabourg, dans la seconde partie « Noms de pays : le pays » qui se déroule en 1898. Les apparitions enchanteresses des donzelles, l’énigmatique Albertine en tête, sont appréciées de la même manière que la contemplation admirative d’un tableau. Surtout s’il a été réalisé par Elstir !

C’est aussi à Balbec qu le narrateur fait la connaissance du marquis Robert de Saint-Loup, son unique et véritable ami, dont les idées avancées détonnent dans son milieu social, celui de la grande aristocratie. Cette nouvelle camaraderie masculine le sort un temps de sa solitude.

Autre événement décisif : l’entrevue avec le baron de Charlus dont le comportement étrange perturbe le narrateur, inconscient des avances de l’oncle de Saint-Loup dont on apprendra plus tard qu’il est un homosexuel contrarié.

Comme dans « Du côté de chez Swann », ce qui est remarquable chez Proust est son talent à décrire avec finesse la psychologie de son narrateur, miroir de nous-mêmes.

EXTRAITS

  • Il est rare qu’un bonheur vienne justement se poser sur le désir qui l’avait réclamé.
  • Le monde immense des idées n’existait pas pour elle.
  • L’amour le plus exclusif pour une personne est toujours l’amour d’autre chose.

+ There are no comments

Add yours