Critique – Les enfants de Staline – Owen Matthews

Critique – Les enfants de Staline – Owen Matthews


En racontant l’histoire de sa famille, le journaliste anglo-russe Owen Matthews a voulu montrer comment l’histoire peut influencer le destin d’hommes et de femmes ordinaires, comment les guerres et la folie des gouvernants font de simples citoyens non pas des héros mais de vrais personnages de romans.

Tout commence par l’histoire du grand-père de l’auteur : Boris Bibikov est le communiste soviétique parfait. Pourtant, la paranoïa du régime stalinien va en faire une victime des purges. Et sa famille souffrira de sa disgrâce. En particulier sa fille Ludmila, la mère d’Owen Matthews, ballottée par une guerre qui n’en finit pas.

Côté anglais, la situation est plus calme chez les Matthews. Mais la fascination de Mervyn pour l’Union Soviétique va déclencher un engrenage kafkaïen. Après avoir travaillé en URSS, il est expulsé pour refus de collaboration avec le KGB. Il laisse sur place son amour, Ludmila, et mettra six années à l’exfiltrer de son pays natal pour la ramener en Grande-Bretagne.

Génétiquement attiré par la Russie, Owen s’y rend dans les années 1990 pour y assister à l’effondrement de l’empire, une période qu’il décrit très bien dans « Moscou Babylone » publié en 2013.

A travers des êtres forts de chair et de sang, « Les enfants de Staline » retracent plus de 60 ans de l’histoire d’un peuple qui continue à nous ensorceler tant ses contradictions sont exacerbées. Passionnant bien qu’un peu long parfois, notamment les derniers chapitres.

EXTRAITS

  • « La langue russe abonde en verbes pronominaux réfléchis parce que les Russes sont pathologiquement irresponsables. Pour dire « Je veux » ou « J’ai besoin de », le russe dit : « Le désir m’est venu de » ou « Le besoin m’est venu de ». La grammaire reflète à merveille la mentalité de cette société infantile ! » (p. 21).
  • « Une des photos les plus insoutenables du vingtième siècle montre des paysans émaciés, arrêtés pour avoir tenté de vendre des carcasses d’enfants démembrés sur l’étal d’un marché ukrainien. » (p. 56).
  • « Pour survivre et tenter d’être heureux, les Russes ont tant à ensevelir, tant à enfouir en eux-mêmes ! Rien d’étonnant à ce que l’intensité de leurs plaisirs soit si vive : elle doit compenser celle de leurs souffrances. » (p. 90).

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