Critique – Tijuana Straits – Kem Nunn

Critique – Tijuana Straits – Kem Nunn


Au Mexique, un enfer de la violence, « l’homme est un loup pour l’homme ». Magdalena, une jeune autochtone, est l’assistante d’une avocate qui œuvre pour que les entreprises nord-américaines soient condamnées pour la pollution de leurs usines qui tue à petits feux les ouvriers et leurs enfants. Cette pasionaria milite aussi en faveur des femmes battues et pour que l’avortement soit légalisé ailleurs que dans la capitale. Gênante, elle est l’objet d’un contrat qui vise à la liquider. C’est Armando, un homme qui a pété les plombs depuis la mort de son fils atteint d’une malformation congénitale qui ne serait pas sans lien avec les cochonneries déversées par les industries, qui va s’y coller. Avec une énergie décuplée par l’absorption à haute dose de drogues les plus diverses.

Sa première tentative échoue. Et Magdalena aussi puisqu’elle traverse la frontière et se retrouve dans la vallée de Tijuana où elle est recueillie par Sam Fahey, alias La Mouette en référence à ses anciens exploits de surfeur.

Fils d’une pourriture qui se faisait de l’argent sur le dos des clandestins, il vit retiré du monde après quelques passages en prison. En communion avec la nature, il survit grâce à un élevage de vers. L’arrivée de Magdalena va rompre sa solitude et, en se donnant pour mission de la protéger, donner un sens à une existence rythmée jusqu’alors par l’ingestion d’alcool et de substances illicites.

« Tijuana Straits » est un roman écologique qui magnifie avec lyrisme la nature et dénonce les conséquences d’une économie productiviste et aveugle aux conséquences de ses activités. C’est aussi, dans la plus pure tradition du « noir », un roman social qui dénonce toutes les formes de violence des sociétés qu’elles soient développées ou en voie de développement.

Mais c’est surtout, au-delà de l’intrigue, un roman profondément humain où les personnages donnent du relief et de la chair à l’histoire. Avec une préférence pour Sam qui emprunte le chemin de la rédemption et de la liberté.

EXTRAITS

  • « IL N’Y A RIEN, assuraient les lettres délavées, QU’UN JOUR DE SURF NE PEUT ARRANGER. » (p. 35).
  • « Dans un monde où les enfants naissaient sans cerveau, il était tout simplement naturel qu’on veuille se venger un peu. » (p. 158).
  • « Le Mexique se veut l’ami du business. Le coût humain n’entre pas en considération. » (p. 224).
  • A propos de Fahey : « C’était un homme de douleur et habitué à la souffrance. » (p. 262).
  • « de même que les chiens pendus échappèrent à son champ de vision car on les avait accrochés à l’écart de la route, parmi les ombres qui s’intensifiaient, et que c’était, comme tout le reste, trop sinistre pour être envisagé. » (p. 264).

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