Critique – 2084. La fin du monde – Boualem Sansal
« La religion fait peut-être aimer Dieu mais rien n’est plus fort qu’elle pour faire détester l’homme et haïr l’humanité » peut-on lire en exergue de « 2084. La fin du monde ».
En réécrivant le roman presque éponyme de George Orwell qui dénonçait les dangers du stalinisme, Boualem Sansal s’attache à mettre en scène une dictature fondée cette fois-ci sur la religion.
Nous sommes en Abistan, un pays théocratique qui se réclame de Yölah et de son délégué Abi.
Comme dans tout système totalitaire, le passé a été effacé, l’histoire réécrite, une nouvelle langue (l’abilang) créée. L’individu n’existe plus, il est intégré dans une vaste communauté sous contrôle et régie par une pensée unique.
Ati (ne pas confondre avec Abi) est un pauvre hère souffrant de tuberculose. En sortant du sanatorium, il est saisi par le doute et remet en question les vérités toutes faites. Il va même jusqu’à découvrir, aux frontières de l’empire, un territoire « ghetto » dont la population vit sans l’omniprésence de la religion.
Si j’ai bien aimé la première partie qui décrit parfaitement le fonctionnement du régime abistanais, j’ai été déçue par la suite du roman, parfois compliquée, manquant de rythme, souvent pesante. Et le personnage d’Ati est tellement fade qu’il est difficile de comprendre comment il a pu se révolter dans sa tête contre son pays.
Pour découvrir le talent de Boualem Sansal, mieux vaut lire « Le village de l’Allemand ».
EXTRAITS
- « Les temps avaient changé, selon la Promesse primordiale, un autre monde était né, dans une terre purifiée, consacrée à la vérité, sous le regard de Dieu et d’Abi, il fallait tout recommencer, tout réécrire, de sorte que la vie nouvelle ne soit d’aucune manière entachée par l’Histoire passée désormais caduque, effacée comme n’ayant jamais existé. »
- « Quel meilleur moyen que l’espoir et le merveilleux pour enchaîner les peuples à leurs croyances, car qui croit a peur et qui a peur croit aveuglément. »
- « C’est son regard qui attira celui d’Ati, c’était le regard d’un homme qui, comme lui, avait fait la perturbante découverte que la religion peut se bâtir sur le contraire de la vérité et devenir de ce fait la gardienne acharnée du mensonge originel. »
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