Critique – La succession – Jean-Paul Dubois – L’Olivier
Depuis qu’il vit à Miami, Paul serait presque heureux. Mais tout est relatif chez cet homme qui vit sans racines et sans attaches.
Médecin de formation comme ses aînés, il a quitté Toulouse pour la Floride afin d’y pratiquer le dur métier de pelotari, sa passion depuis qu’il passe chaque été au Pays Basque. Il a certes quelques relations parmi ses collègues mais c’est un chien qu’il sauve de la noyade qui va devenir son ami le plus fidèle.
Pas de quoi cependant le sortir de son asociabilité pathologique. Mais d’où lui vient ce sentiment de solitude comme si un poids l’empêchait d’entrer dans la vraie vie, d’avoir une compagne, des enfants ?
La réponse se trouve dans l’héritage parental. Chez les Katrakilis, on s’adonne au suicide aussi facilement que Paul pratique la cesta punta avec maestria.
Tout commence avec le grand-père, un mythomane qui aurait été le médecin de Staline et aurait emporté une lamelle du cerveau du dictateur au moment de l’autopsie. Suivent l’oncle puis la mère.
Puis il reçoit un courrier lui annonçant la mort de son père. Ce dernier s’est jeté d’un immeuble le visage enrubanné d’un scotch. Fils unique, Paul est seul pour gérer ce qui doit l’être : les obsèques, la vente de la vaste maison toulousaine…
A la crémation, il a la surprise de voir une foule de patients admiratifs de l’homme qui aurait consacré sa vie à soulager les autres.
En découvrant deux carnets mystérieux, il en découvre encore plus sur le secret de son géniteur.
Commençant sur un ton désabusé, qui est un peu la marque de fabrique du style de Jean-Paul Dubois, le roman glisse progressivement vers l’inéluctable.
Même si on veut rompre avec elles, on est toujours prisonnier de ses origines comme si le destin était écrit à l’avance.
EXTRAITS
- Certes, les suicides de tous les miens mettront un peu d’ordre dans la confusion des ces liens, ces apparentements désordonnés, cette inaptitude à s’aimer et et à donner à un enfant ne fût-ce que que l’image d’un peu de confiance et de bonheur. Le plus étrange, c’est que la mort traversa à plusieurs reprises notre maison et les survivants s’en aperçurent à peine, la regardant passer comme une vague femme de ménage.
- Les Katrakilis et les Gallieni étaient des artistes. Ils savaient mourir à n’en plus finir. Crever à la manière de ces mauvais acteurs sollicitant les rappels. Mettre en scène leurs miasmes pour embosser les mémoires, les maintenir dans l’axe du malheur, les amarrer à la peine.
- Désormais j’étais seul sur cette terre et il me faudrait lutter contre les gènes qui l’avaient poussé à se balancer du huitième étage, grimé comme un évadé d’un lazaret.
Vous devez être connecté(e) pour rédiger un commentaire.
+ There are no comments
Add yours