Critique – Les Mangeurs de nuit – Marie Charrel – L’Observatoire
L’immigration japonaise au Canada est un fait peu connu de l’histoire des deux pays. La première vague eut lieu entre 1877 et 1928. On appela les ressortissants de l’Empire du Soleil levant les Issei.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, en raison de la participation du Japon à l’Axe composé de l’Allemagne et de l’Italie, plus de 21 000 d’entre eux furent internés.
Par la fiction, Marie Charrel offre un éclairage saisissant sur le destin de ces populations ostracisées.
Pour trouver un mari et aspirer à une vie meilleure, des milliers de Japonaises, appelées les « picture brides », ont rejoint la Colombie britannique. Parmi elles Aika, 17 ans, qui embarqua en 1926 sur un bateau à destination du port de Victoria. Lorsqu’elle croise le regard de son futur époux, la déception est grande. Le promis est vieux, laid et pauvre mais il sera un formidable conteur pour Hannah, fille unique du couple douée de dons d’observation et de prescience. Bien qu’elle soit née au Canada, celle-ci sera victime d’un racisme haineux qui n’est bien souvent que la conséquence de la méconnaissance de l’autre et du besoin des hommes de fabriquer des boucs émissaires pour expier leurs péchés.
Non loin de là et quelques années plus tard Jack, accompagné de ses chiens Buck (clin d’œil à « L’Appel de la forêt »?) et Astrée, recense les saumons pour le compte du gouvernement canadien. Il est creekwalker et prend à cœur de protéger sa chère forêt des prédateurs humains. Vivant en communion avec la nature, son esprit est nourri par les légendes indiennes transmises par la femme qui l’a élevé. En se retirant du monde « civilisé », Jack tente d’oublier son frère parti à la guerre.
La rencontre entre Jack et Hannah sera salvatrice pour les deux. Elle réconciliera le premier avec lui-même et apportera l’apaisement à la seconde.
En parcourant les destins de ses personnages sur une trentaine d’années, Marie Charrel a composé un récit puissant et lyrique mêlant la réalité et le fantastique pour célébrer les mots qui réinventent le monde, la nature, la fraternité et la tolérance.
Une belle lecture.
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