Critique – Nos richesses – Kaouther Adimi – Seuil

Critique – Nos richesses – Kaouther Adimi – Seuil


Le titre du roman fait référence au nom donné par Edmond Charlot à la librairie qu’il ouvre en 1936 à Alger qui elle-même est un clin d’oeil à l’essai « écologique » « Les vraies richesses » de Giono.

Edmond Charlot n’a que 20 ans lorsqu’il revient dans sa ville natale pour y créer une librairie et devenir éditeur. Ce « passeur de livres » publia ainsi Camus, Giono, Kessel, Gide, Garcia Lorca, Amrouche, Yacine, Dib…, fonda « L’Arche », une revue « concurrente » de la prestigieuse « NRF », et transforma son échoppe en bibliothèque de prêt pour démocratiser l’accès à la chose écrite.

Mais entre la seconde guerre mondiale, la censure, les « événements » d’Algérie, la pénurie de papier et les trahisons, sa tâche est immense et épuisante.

En 1998, le local est transformé en annexe de la bibliothèque centrale d’Alger mais Kaouther Adimi lui invente une autre destination : un commerce de beignets qui lui permet d’introduire le personnage de Ryad venu de France pour rénover le lieu. Il s’apprête à jeter les livres qui s’y trouvent. Mais la résistance dans le quartier pour préserver ce symbole de la culture s’organise. Et c’est Abdallah, ancien employé de la librairie, qui va en prendre la tête. Le miracle opère. Au fur et à mesure qu’il découvre le combat de Charlot, Ryad renoue avec ses racines et, même s’il entretient avec les livres un rapport plus que lointain, le jeune homme apprend beaucoup sur l’histoire littéraire du pays de ses ancêtres.

Portrait d’un homme passionné malgré l’adversité dont l’auteure nous livre des extraits d’un journal imaginé, visite de l’histoire de l’Algérie qui, on ne le sait pas forcément, accueillit de nombreux intellectuels pendant la guerre de 39-45, et éloge de la littérature comme moyen d’expression du tragique, « Nos richesses » est une déclaration d’amour poignante aux mots.

EXTRAITS

  • Il gagnera sûrement beaucoup d’argent. Ici, un beignet vaudra toujours plus qu’un livre.
  • Un livre, ça se touche, ça se sent Il ne faut pas hésiter à corner des pages, à l’abandonner, à y revenir, à le cacher sous l’oreiller…
  • Un homme qui lit en vaut deux.

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