Critique – Terra Alta – Javier Cercas – Actes Sud
Avec « Terra Alta », premier volume d’une trilogie, Javier Cercas, écrivain espagnol réputé pour son exploration du passé sombre de son pays, s’est essayé au roman policier, un genre qui ne lui empêche pas de poursuivre son introspection historique. Bien au contraire.
Alors que son service de nuit s’achève dans un commissariat de la Terra Alta, Melchor reçoit un appel d’un collègue lui annonçant qu’un triple assassinat avait été commis dans une propriété cossue des environs. Deux personnes âgées ont été sauvagement torturées et la domestique roumaine a pris une balle en pleine tête.
Pourquoi s’est-on acharné avec une telle violence sur le richissime et puissant propriétaire des Cartonneries Adell et sa femme ?
Pourtant on lui avait dit qu’il ne se passait jamais rien dans cette comarque ! En affirmant la tranquillité de cette contrée, c’est oublier qu’elle fut le théâtre de la sanglante bataille de l’Ebre pendant la guerre civile espagnole.
Cela fait quatre ans que Melchor vit, avec son épouse et sa fille, dans ce petit bout de terre catalane où il a été muté pour être protégé d’éventuelles représailles de l’État islamique après qu’il a occis quatre de ses membres lors de l’attentat de Cambrils en août 2017.
Avant d’intégrer la police Melchor était un petit malfrat qui paya d’une peine de prison ses multiples forfaits.
C’est au cours de son incarcération qu’il se prend de passion pour la littérature et particulièrement pour l’un de ses grands classiques : « Les Misérables ». De ce pavé hugolien il s’attache à Javert, incarnation de « la vertu déguisée en vice » et prouve qu’un livre a le pouvoir de changer la vie.
C’est cette lecture et l’assassinat non élucidée de sa mère prostituée qui vont le motiver à devenir policier et à abandonner son passé de délinquant.
Récit très maîtrisé campant un personnage complexe et en colère contre toutes les formes d’injustice touchant les plus fragiles, « Terra Alta » est plus qu’un simple roman policier. En employant les codes du genre, Javier Cercas offre un regard d’historien et de quasi anthropologue pour mieux décrire un pays qui n’en finit pas de panser ses plaies.
EXTRAITS
- Quand on pousse le bien à l’extrême, il se transforme en mal.
- La justice absolue peut être la plus absolue des injustices.
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