Critique – Feel good – Thomas Gunzig – Au Diable Vauvert
Pied de nez à la « littérature » qui fait du bien avec ses titres à rallonge, Thomas Gunzig a sobrement intitulé son dernier roman « Feel good ». Mais au lieu de nous livrer des recettes toutes faites pour réussir sa vie, il a écrit un récit social à la fois révolté et légèrement déjanté.
Toute sa vie, la quadragénaire Alice a toujours été « un peu trop juste ». Financièrement parlant. Et lorsqu’elle se retrouve au chômage à un âge où la société vous pense finie, elle a une idée : kidnapper un bébé d’une famille riche en espérant percevoir une rançon qui lui permettrait d’avoir enfin une existence décente. C’est à cette occasion qu’elle rencontre Tom, un écrivain qui, à cause des histoires glauques qu’il raconte, n’a toujours pas rencontré son public.
Evidemment, ces deux-là font former une équipe pour sortir de leur misère respective, financière pour Alice, psychologique et morale pour Tom. N’en disons pas plus. Dans une écriture fluide, Thomas Gunzig, dans la veine d’un Iain Levison, décrit avec justesse la vie des gens de peu qui, malgré les vicissitudes, font tout pour s’en sortir. C’est le cas d’Alice, plus terre à terre, moins celui de Tom qui trouve enfin le bonheur lorsqu’il accepte son absence de génie.
Il porte aussi sur le métier d’écrivain, le milieu littéraire et l’évolution de l’édition un regard à la fois lucide et effrayant dans la mesure où les réseaux sociaux confortent le lecteur dans ses goûts lui ôtant toute curiosité pour découvrir d’autres univers romanesques.
J’aurais juste aimé qu’il fût plus transgressif et plus amoral.
EXTRAIT
La misère pour elle et la misère pour Achille qui grandirait là-dedans comme un rat derrière une plinthe, son enfance entière passée à l’ombre du manque d’argent, une enfance comme un jardin orienté au nord, une enfance qui serait suivie, comme le prédisaient les statistiques, par une vie précaire, une vie qui serait comme celle de sa mère : une vie « au bord du gouffre », une vie à peine en équilibre.
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