Critique – Berline – Céline Righi – Les Éditions du Sonneur

Critique – Berline – Céline Righi – Les Éditions du Sonneur


À la suite d’une explosion, Fernand est coincé au fond de la mine, le corps en morceaux. Le silence, la nuit, la claustration, la faim et la soif le tourmentent.

Paradoxalement cet enfermement dans les entrailles de la terre est presque une chance pour ce jeune homme qui n’a jamais le temps, harassé par le travail, de se poser pour réfléchir.

Aidé par un oiseau imaginaire sorti de son esprit, il fait le bilan de sa courte vie en laissant les souvenirs affleurer : la froideur d’une mère dévastée par la mort d’un enfant un an avant sa naissance ; la gentillesse taiseuse d’un père ; son premier amour ; son amitié pour Mario le costaud alors que lui est surnommé « l’allumette » ; les mantras fatalistes de la mère (« les pas le choix, les la vie c’est comme ça, les on n’y peut rien changer ») ; la tendresse des grands-parents, de l’oncle et de la tante ; la solidarité entre les mineurs…

Dans le huis clos ténébreux de la mine, les rêves de Fernand sont peuplés de couleurs ; celles des yeux de Martha, celles des champs de blé, celles de l’océan qu’il n’a jamais vu pour « troquer les gris des cités minières contre le bleu atlantique »…

Avec une grande justesse dans la narration, Céline Righi, qui signe un premier roman aux accents lyriques et nourri de métaphores, fait le récit poignant d’un garçon conditionné par son milieu dont il n’a pas osé s’affranchir.

Sa solitude forcée l’encourage, s’il sort du trou où il est bloqué, à aspirer à la plus grande des libertés, la liberté de choisir une autre existence que celle qui est toute tracée. Pour retrouver enfin le goût de vivre.

Son portrait sensible incarne le destin des immigrés italiens qui ont servi de bras dans les mines de l’Est de la France et plus largement de tous ceux qui ont trimé sous la terre au péril de leurs vies.

EXTRAITS

  • « Allumette », une trouvaille de la mère qui ne manquait jamais d’imagination quand il s’agissait de lui esquinter le cœur.
  • Ça avait toujours été comme ça, chez eux on se transmettait la mine de père en fils, comme un flambeau.
  • Dans la mine, sous la peau et dans l’âme, la nuit persiste.

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