Critique – D’un cheval l’autre – Bartabas – Gallimard
En 1957 était publié « D’un château l’autre » de Louis-Ferdinand Céline. Dans « D’un cheval l’autre », on est bien loin de Sigmaringen. Le grand écuyer Bartabas nous invite en effet à partager ses rencontres avec les chevaux qui ont le plus compté dans sa vie d’artiste et d’homme.
Il y a Hidalgo, « le cheval de la préhistoire » qui a « vu naître Bartabas le Furieux ».
Il y a Zingaro bien sûr, l’imposant frison à « la grâce de ceux qui n’ont pas encore la parole » et celui qui a donné son nom au théâtre équestre fondé en 1984.
Il y a Chaparro et son « enthousiasme communicatif de ceux qui ont côtoyé la mort et sont reconnaissants à la vie ».
Il y Dolaci, celui qu’il attendait, dont le galop est « limpide comme un choral de Bach ».
Il y a Quixote qui galope en arrière.
Il y a Félix, « une petite frappe pleine de morgue », un « hooligan en blouson noir ».
Il y a Horizonte qui porte encore beau à trente ans.
Et puis il y a tous ceux qui sont cités à la fin du livre dont certains ont été tirés des mains de maquignons sans scrupule.
Jérôme Garcin, auteur de « Bartabas, roman » publié en 2004, disait récemment de son ami qu’il était un cheval. Cette affirmation est assez proche de la réalité. Je dirais que ce taiseux solitaire un brin misanthrope et insomniaque comme ses compagnons qui ne dorment que quatre à cinq heures par jour a communié avec tous ceux qui ont partagé sa vie. « J’allais contaminer son animalité et il allait me permettre d’exister parmi les hommes » confie-t-il à propos de Zingaro.
Avec pudeur, émotion, sensualité et lyrisme, Bartabas nous fait partager ses plus belles histoires d’amour avec ces chevaux qui lui ressemblent tant. Une très belle lecture qui nous fait toucher la grâce.
EXTRAITS
- Les chevaux sont mes yeux pour regarder le monde.
- Pour éteindre l’insomnie, je les épelle un à un. Longue caravane, sans tambours ni musique, ils défilent lentement dans ma nuit et m’emmènent vers le sommeil, enfin.
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