
Critique – Malu à contre-vent – Clarence Angles Sabin – Le Nouvel Attila
Le roman rural, qu’il se rattache au polar, au noir ou à la vogue américaine du « nature writing », a le vent en poupe.
Loin de la littérature de terroir aux accents parfois pétainistes qui encense les traditions, ce sous-genre exprime des préoccupations plus actuelles : l’écologie, le dérèglement climatique, le refus d’une vie dictée par les nouvelles technologies qui accélèrent le temps pour mieux le vider de sa substance…
Parmi les « nouveaux » auteurs français qu’on pourrait rattacher à ce courant, on pourrait citer : Marie-Hélène Lafon, Sandrine Collette, Serge Joncour, Colin Niel, Gaspard Koenig, Cécile Coulon, Franck Bouysse…
Dans son premier roman, Clarence Angles Sabin nous entraîne au cœur de l’Aveyron, la région où elle a grandi dans un milieu d’agriculteurs.
Malu, douze ans, vit avec son père et sa grand-mère paternelle sur un territoire âpre rythmé par les saisons. Mais depuis quelques années, les températures grimpent et les phénomènes atmosphériques s’intensifient provoquant des dégâts irrémédiables.
Ces ravages, les agriculteurs sont aux premières loges pour les constater. Ils en sont aussi les plus atteints.
Éleveur de brebis, le père de Malu ne peut que déplorer la mort qui s’abat sur son troupeau.
Alors, en cachette, la gamine leur dresse des sépultures. Elle creuse inlassablement dans un sol de cailloux jusqu’à se faire mal et à mêler son sang à la terre aride devenue une sorte de refuge.
En revisitant le mythe d’Antigone et sa dimension tragique, la primoromancière a personnifié les notions de révolte, de justice et de devoir.
Au-delà de ces considérations philosophiques subtilement et poétiquement amenées, « Malu à contre-vent » est un récit sensible au sens où il nous fait éprouver au plus près les impressions et perceptions éprouvées par les protagonistes – la relation à la nature pour la fillette et le sentiment à la fois de liberté et d’attachement qu’elle procure, le rapport à la dureté du travail pour le père, la perte de la mémoire pour la grand-mère – tout en s’interrogeant sur ce qu’est l’amour au sein d’une famille et comment on grandit et on se projette dans un environnement qui se meurt, dans une nature qui, de protectrice devient une menace pour ceux qui y vivent, nous rappelant la fragilité des existences humaines.
Merci à Babelio et au Nouvel Attila pour cette lecture.
EXTRAITS
- Elle avait le vert dans le sang.
- Cette terre ne voulait plus d’eux. Les humains s’étaient approprié tous ses dons, sans jamais rien lui offrir en retour. Elle rompait le pacte de confiance qu’elle avait signé avec eux. Il n’y avait plus de retour en arrière.
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