Critique – Mapuche – Caryl Férey

Critique – Mapuche – Caryl Férey


J’avais beaucoup aimé « Zulu » publié en 2008. Comme son titre l’indique, l’intrigue se déroulait en Afrique du Sud.

Cette fois-ci, l’auteur nous emmène en Argentine, pays où la dictature des généraux a causé des milliers de morts. Fait marquant des régimes totalitaires qui se sont succédé dans ce pays d’Amérique latine : l’enlèvement d’enfants dont le mouvement des Mères de la Place de Mai entretient le souvenir depuis 1977.

Dès le premier chapitre, Caryl Férey titille notre curiosité. Un avion survole le Rio de la Plata. Un certain Hector Parise s’apprête à lancer un paquet lorsque celui-ci ouvre les yeux avant le grand saut…

Jana, une Mapuche dont le peuple a été en partie décimé par les chrétiens, suit des cours aux Beaux-Arts à Buenos Aires. Sa meilleure amie est Paula-Miguel, un travesti. Ce dernier s’inquiète de la disparition de Luz, lui aussi travesti, et demande à Jana de l’aider à le retrouver. Dans le port, il découvre son cadavre atrocement mutilé. Les flics, présents sur les lieux, ne s’émeuvent pas de ce qui est manifestement un assassinat.

Ruben est le fils de Daniel Calderon, un poète qui a disparu avec sa fille, tous deux victimes du régime des militaires. Ruben aussi a été enlevé mais il n’a jamais voulu parler de cette « expérience » à son entourage, en particulier à sa mère Elena, militante au sein du mouvement des Mères de la Place de Mai.

De retour de captivité, cet homme taciturne devient journaliste puis détective pour retrouver les responsables des enlèvements. Carlos, son meilleur ami et journaliste d’investigation, le contacte pour l’informer de la disparition d’une certaine Maria Victoria Campallo, fille d’un riche homme d’affaires soutien financier du maire de Buenos Aires.

Jana et Ruben, « héros » de ce roman, vont faire équipe pour découvrir la vérité sur ces disparitions qui sont le signe que le passé n’est jamais mort.

Mené à un rythme effréné, « Mapuche », par sa riche documentation sur une époque que nous connaissons peu, nous fait découvrir une Argentine corrompue, lâche, avide de pouvoir et d’argent, ayant des difficultés à châtier les coupables.

C’est le principal intérêt de ce livre. En revanche, le style, un peu lourdingue, maladroit, sonne parfois faux. Certaines phrases et certains dialogues prêtent même à rire, atténuant le côté dramatique des événements.

Exemples :

  • « Un orage gris de colère » (p. 269)
  • « Les flammes rougeoyaient sur son visage apaisé après l’amour » (p. 297)
  • « Ils chuintaient de haine » (p. 320)
  • « Ils sont entrain de la torturer » feula Ruben (p. 338)

Côté psychologie des personnages, on est servis. Les méchants sont très méchants. Les personnages de Jana et Ruben, que leurs blessures respectives vont rapprocher, sont parcourus de sentiments qui leur donnent une épaisseur : désir de vengeance, qui exacerbe la haine mais aussi irrépressible soif de vivre.

Ce roman est le lauréat du Prix des lecteurs de la ville de Brive 2012 qui fut décerné à la Foire du Livre.

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