Critique – Monique s’évade – Édouard Louis – Seuil

Critique – Monique s’évade – Édouard Louis – Seuil


Alors qu’il est en résidence à Athènes, Édouard Louis reçoit un appel de sa mère. En pleurs, celle-ci lui confie que son calvaire recommence (cf. « Combats et métamorphoses d’une femme »). L’homme avec lequel elle vit à Paris depuis qu’elle a quitté le père de l’auteur boit, l’insulte et l’humilie.

Ni une ni deux, le fils organise à distance « l’évasion » de Monique.

Cette « évasion » signe la réconciliation définitive entre un enfant et sa génitrice et son récit dégage optimisme et joie, celles que déclenche un pied de nez à l’assignation à résidence qui prévaut majoritairement dans les milieux populaires.

Et c’est là que le livre prend toute sa dimension politique.

Édouard Louis s’interroge en effet sur le pouvoir de l’argent. Paradoxalement, c’est parce qu’il est devenu un écrivain célèbre en nourrissant son œuvre de l’histoire familiale (cf. « En finir avec Eddy Bellegueule »), quitte à se fâcher avec les siens, qu’il est capable de sauver sa mère et de « l’entretenir ».

Sans ressources financières suffisantes, impossible de fuir. Cette impuissance, les privilégiés n’y sont pas confrontés.

« Combien de femmes changeraient de vie si elles obtenaient un chèque ? » se demande l’auteur, soulignant combien la condition sociale conditionne la liberté de s’échapper pour ne plus subir la violence.

En mêlant la sociologie et l’intimité, « Monique s’évade » est un texte subtil qui décrit avec tendresse et émotion la transformation d’une femme qui s’épanouit en devenant fière d’elle. C’est aussi la chronique d’un changement chez Édouard Louis qui trouve l’apaisement dans un rôle de rédempteur.

L’auteur rejoint le club de ceux qui, tels Marcel Proust et Romain Gary, ont su si bien parler de leur mère.

EXTRAITS

  • Il y a des êtres portés par la vie et d’autres qui doivent lutter contre elle.
  • La liberté a un prix, un prix que ma mère ne pouvait pas payer.
  • Sa vie avait été, jusqu’à maintenant, une vie pour les autres.
  • Parce que la liberté est aussi une affaire de détails.

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