Critique – Lumière d’été, puis vient la nuit – Jon Kalman Stefansson – Grasset – Grasset
D’emblée le narrateur, observateur omniscient, prévient le lecteur que, dans la bourgade islandaise de quatre cents âmes dont il va nous raconter l’histoire, il ne se passe rien ou presque.
L’endroit recèle pourtant quelques singularités. Il n’abrite aucun cimetière ni église, l’espérance de vie y est plus élevée qu’ailleurs et certains de ses résidents choisissent, sans qu’on sache pourquoi, de changer de vie. A l’instar de celui qu’on surnomme l’Astronome, personnage fil rouge du roman, qui abandonna femme, enfants et métier, apprit le latin et devint « plus proche du ciel que de la terre ».
Dans cette chronique villageoise, Jon Kalman Stefansson sonde le cœur des habitants, leur solitude, leurs secrets, leurs désirs, leurs amours, leurs pulsions, leurs regrets… Pour faire revivre les morts et ne pas les oublier, les fantômes s’invitent parfois dans leurs existences.
Avec en arrière-plan un territoire rugueux où les hivers s’éternisent, l’auteur de la magnifique trilogie inaugurée avec « Le cœur de l’homme » nous adresse, avec sa patte poétique et mélancolique, un message universel sur le sens de nos destins, sur leur finitude, leur inanité, leur vacuité, sur la frontière ténue entre la vie et la mort et sur l’entêtement de l’humanité à détruire son environnement et à courir après des chimères au lieu de se poser « pour écouter la pluie ».
J’avoue cependant m’être parfois égarée dans le récit et ne pas avoir été touchée par certains personnages. En revanche, la fin est très belle.
EXTRAITS
- Nous jacassons à longueur de temps sur des choses sans intérêt, le diamètre des pneus, puis nous mourrons.
- Celui qui pleure à un enterrement, pleure également sa propre mort et en même temps celle du monde, parce qu’à la fin tout meurt et il ne reste rien.
- Le rêve d’un monde meilleur s’est assoupi dans le canapé dernier cri.
- Un jour, tout se change en souvenirs et vous voilà mort.
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