Critique – La Vie devant soi – Émile Ajar – Gallimard

Critique – La Vie devant soi – Émile Ajar – Gallimard


Signé Émile Ajar, « La Vie devant soi » a reçu le Prix Goncourt en 1975. Ce n’est qu’à la mort de Romain Gary en 1980 qu’on découvrit qu’il en était bien l’auteur et qu’il avait utilisé un pseudonyme.

Mohammed alias Momo a dix ans. Ce gamin sensible, débrouillard et plein de bon sens vit avec Madame Rosa, une vieille Juive et ancienne pute qui accueille les enfants abandonnés par leurs mères prostituées.

Ces deux-là sont liés par un amour inconditionnel. À la vie à la mort.

Après que Madame Rosa a pris soin de l’enfant, c’est au tour de celui-ci de veiller celle qui a payé cher sa déportation à Auschwitz. Son corps fiche le camp et elle perd la tête. Momo assiste impuissant à sa déchéance. Il ne peut que lui tenir la main et la faire rêver grâce à son imagination débordante.

Faire d’un enfant le narrateur d’un roman est un pari risqué que Ajar-Gary a réussi avec une grande justesse.

Sans pathos et dans une écriture inventive aux accents céliniens mêlant trivialité, moments poétiques, humanité, tendresse et humour, « La Vie devant soi » fait non seulement le récit d’une relation improbable mais aussi le portrait du quartier populaire de Belleville avec son métissage et sa solidarité entre les gens de peu où l’on croise des « proxynètes », une « travestiste » au grand cœur et des Africains parqués dans des foyers surpeuplés.

EXTRAITS

  • Pendant longtemps, je n’ai pas su que j’étais arabe parce que personne ne m’insultait.
  • Elle était si triste qu’on ne voyait même pas qu’elle était moche.
  • Quand elle marchait, c’était un déménagement.
  • Le docteur Katz disait qu’il n’y a rien de plus contagieux que la psychologie.
  • Ce qui reste le plus chez les vieux, c’est leur jeunesse.
  • Le bonheur est connu pour ses états de manque.
  • Ils étaient tous tellement cons qu’ils étaient toujours de bonne humeur.
  • Il avait le sourire plein la gueule.
  • Les vieux ont la même valeur que tout le monde, même s’ils diminuent.

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