Critique – L’ami – Tiffany Tavernier – Sabine Wespieser
Un matin, Thierry ouvre la porte de sa maison et découvre, stupéfait, des voitures de police débouler devant la maison de ses voisins. Une vingtaine d’hommes du GIGN surgissent de la forêt et donnent l’assaut sur la demeure de Guy et Chantal.
Le Capitaine Bretan de la gendarmerie nationale intime à Thierry de s’éloigner. Que se passe-t-il chez « nos amis » s’interroge le narrateur, se rappelant les apéros, les repas autour d’un barbecue, la « complicité d’outils » et la passion pour les insectes qu’il partage avec Guy ?
C’est une journaliste du genre inquisiteur qui lui annonce que ce dernier est un serial killer amateur de jeunes filles qu’il violait avant de les occire. Avec la complicité silencieuse de Chantal.
La colère d’avoir été trahi et la culpabilité succèdent à l’incrédulité et au déni. A cause de cette félonie, ce qui était une existence banale, sans histoires mais plutôt agréable avec une épouse qu’il aime vole en éclats. D’autant plus que Thierry se sent responsable de n’avoir rien vu. Mais n’a-t-il pas toujours été aveugle : avec sa femme dont il ne perçoit pas la détresse de vivre dans cette maison perdue qu’elle déteste, avec son fils qui vit au Vietnam, avec ses collègues… ?
Comme une détonation, les souvenirs d’enfance affluent comme des petites lumières éclairant les causes de la profonde solitude, du mutisme et de l’impression d’absence et d’indifférence aux autres que dégage « l’enfant du dessous des couvertures » comme Thierry se qualifie.
Avec « L’ami » Tiffany Tavernier sonde magistralement les mystères de la nature humaine : l’ambivalence des sentiments qu’on ne parvient pas à exprimer, l’incommunicabilité entre les êtres, l’altérité mais aussi la capacité à rebondir en prenant conscience de qui on est vraiment.
EXTRAITS
- Je suis l’enfant qui refuse d’approcher son père, l’enfant qui, des heures durant, contemple le dos immobile de sa mère devant la table de la cuisine, je suis le père de Marc, le mari d’Elisabeth, le type sans histoires sur lequel tous peuvent compter à l’usine. Pourquoi tout ceci m’arrive ?
- C’était une des choses que j’aimais le plus chez lui. Cet amour sans limite pour les toutes petites bêtes.
- Je suis si seul, s’il vous plaît, faites qu’il redevienne mon ami.
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