Critique – Avant les années terribles – Victor del Arbol – Actes Sud

Critique – Avant les années terribles – Victor del Arbol – Actes Sud


Plonger ses personnages au cœur des convulsions de l’histoire est un peu la marque de fabrique de Victor del Arbol.

Après le très réussi « Toutes les vagues de l’océan » (2017), dernier roman lu de ce dernier, nous quittons l’URSS pour l’Ouganda tout en gardant Barcelone comme port d’attache.

Nous sommes au début de l’année 2016 dans la capitale de la Catalogne. Isaïe vit heureux avec sa compagne Lucia enceinte de cinq mois lorsqu’il reçoit la visite d’Enmanuel K, un homme qu’il a connu enfant dans un petit village situé au nord de l’Ouganda. Proche du pouvoir en place, celui-ci lui demande de participer à une conférence prônant la réconciliation nationale après des années de conflits civils.

L’arrivée d’Isaie, flanqué de son épouse, dans son pays natal va faire ressurgir les fantômes du passé qu’il voulait oublier et les souvenirs d’une époque où âgé de 12 ans, il avait été enrôlé par Joseph Kony et son Armée de résistance du Seigneur, une milice de rebelles hallucinés opposés au gouvernement et qui sèment la terreur au nom de la pureté originelle.

Pourtant, il aurait aimé se rappeler les moments d’insouciance d’avant les années terribles, ceux où il jardinait avec sa grand-mère tant aimée, où il s’éveillait à la sensualité en regardant la belle Lawino, où il protégeait son petit-frère…

Mais ce sont les images de l’adolescent, alias le Chasseur, qu’il est devenu, massacreur d’albinos « à cause de leurs prétendus pouvoirs magiques » qui le harcèlent.

Mais, malgré son conditionnement, Isaïe n’aspire qu’à une chose : fuir pour survivre.

Avec, en arrière-plan, la terrible guerre intestine en Ouganda, Victorel del Arbol explore la condition des enfants-soldats à la fois victimes et bourreaux. Dressés pour commettre des actes qui relèvent du mal absolu, existe-t-il pour eux une forme de rédemption, une possibilité de devenir des adultes apaisés, de ne plus être « obligés de décider entre le mal et le pire » ? La réponse, forcément nuancée, est dans « Avant les années terribles » à propos duquel on peut regretter une construction un peu erratique.

Juste une petite remarque à l’intention du traducteur et de l’éditeur : la première personne du singulier du présent de l’indicatif du verbe haïr est je hais et non je haïs !

Sur le même thème, je conseille la lecture de « Johnny chien méchant » d’Emmanuel Dongala.

EXTRAITS

  • Ici, le passé reste toujours le présent.
  • Nous étions notre enfer et notre paradis.
  • Le haïr m’avait permis de supporter la honte, les remords et la culpabilité.
  • En ce monde, l’innocence n’est pas une armure.

+ There are no comments

Add yours