Critique – Ecoute la ville tomber – Kate Tempest – Rivages

Critique – Ecoute la ville tomber – Kate Tempest – Rivages


« Partir » (titre du prologue) pour fuir une ville, Londres, impitoyable pour les jeunes qui ont des rêves mais pas les moyens de les réaliser parce que leurs aspirations ne peuvent s’exprimer dans une société libérale où seule compte la réussite financière.

Becky, passionnée par la danse, ne parvient pas à percer. Pour boucler les fins de mois, elle travaille dans le bar que tiennent ses oncles et pratique des massages un peu spéciaux, avec chorégraphies plutôt osées.

Elle embarque dans une voiture filant à toute allure hors de la capitale. A ses côtés, Harry, une lesbienne dealeuse mal dans sa peau et qui attire les ennuis, Leon, le meilleur pote de cette dernière, et une « valise pleine de pognon ».

Kate Tempest nous entraîne un an plus tôt et décrit le processus qui les a amenés à prendre la tangente. Qu’il s’agisse du trio ou encore de Pete, le petit ami dépressif de Becky et le frère de Harry, tous ont grandi dans des familles explosées. Difficile alors de trouver un équilibre, un sens à sa vie et de se projeter dans un avenir improbable qui ne sourit qu’à ceux qui ont déjà tout.

Dans une écriture rythmée (Kate Tempest est poétesse et rappeuse), moderne s’il en est même si je ne sais pas trop ce que cela signifie, avec un sens de la formule choc (« Un rayon de soleil fugace zébra ses cuisses » ; « Ses jambes, lorsqu’elle marchait, était de la lave en fusion » ; « Un rictus traîne sur son visage comme un slip sale par terre ») et des images quasi subliminales, l’auteure stigmatise le mal contemporain : la solitude amplifiée par la superficialité des relations, les faux-semblants, le désenchantement et l’égocentrisme. Son message humaniste est clair : cueillez l’amour et profitez de la vie. Pas facile !

EXTRAIT

  • Des types vieux avant l’âge sourient comme des méchants de dessin animé à des nymphettes sans amour-propre cachant des secrets inavouables.
  • La crasse incrustée dans les murs, c’est la crasse qu’ils ont connue toute leur vie.
  • Nous avons une foule de gens en nous.

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