Critique – La neuvième heure – Alice McDermott – Quai Voltaire

Critique – La neuvième heure – Alice McDermott – Quai Voltaire


Rares sont les romans qui ont la grâce. « La neuvième heure » est de ceux-là.

Au sens religieux (et il en est beaucoup question dans ce roman), la grâce est une sorte de don que Dieu nous accorde, pauvres humains, pour résister à la tentation. En littérature, la grâce pourrait être synonyme de charme et d’élégance.

Le récit d’Alice McDermott commence par l’une des scènes les plus tragiques qui soient, celle du suicide d’un homme alors que sa femme Annie attend leur premier enfant. Dans ce Brooklin du début du vingtième siècle où se concentrent de nombreux Irlandais, pas question de vivre son deuil seule. Les  Petites Sœurs soignantes des Pauvres Malades de la Congrégation de Marie devant la Croix entourent la veuve, lui trouvent un travail et l’aident à élever sa fille Sally en espérant que celle-ci aura la vocation.

Nulle nécessité d’être croyant pour être touché par cette histoire simple qui sonne si juste. L’auteur de « Someone » décrit sans artifices le dévouement aveugle des fiancées du seigneur, si admirables, si douces, si réconfortantes pour la lie pervertie de l’humanité mais aussi l’hypocrisie et le manque d’empathie de l’Eglise catholique en tant qu’institution qui refuse une messe à un suicidé et qui condamne sans compassion tous les comportements déviants en imposant sa morale étriquée approuvée par la classe dominante.

Condionnées par leur éducation parfois oppressante, Sally et sa mère parviendront-elles à devenir des femmes libres et épanouies ? C’est tout l’enjeu de cette histoire où toutes les variations de l’amour, filial, maternel ou autres, se déclinent à l’infini.

Un joli livre qui rappelle que l’amour, quand il se dresse contre les bonnes mœurs et les prétendus péchés, peut être plus fort que tout.

EXTRAITS

  • Comme toute bonne mère, l’Eglise devait gifler ses enfants quand ils désobéissaient.
  • Elles étaient les gardiennes de nos matins fiévreux.
  • Tous les matins, nous envoyons des sœurs immaculées de par les rues, n’est-ce pas ? Un tissu propre à appliquer sur le monde souffrant.
  • Si nous pouvions vivre sans souffrance, dit sœur Lucy, nous ne trouverions pas la paix au ciel.

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