Critique – Underground Railroad – Colson Whitehead – Albin Michel

Critique – Underground Railroad – Colson Whitehead – Albin Michel


Nous sommes en Géorgie, un état du sud des Etats-Unis, quelques années avant la guerre de Sécession.

Cora, une adolescente, est esclave dans une plantation de coton. Abandonnée par sa mère qui a fui, elle se laisse convaincre par Caesar de s’échapper.

Pour rejoindre le nord, ils empruntent l’underground railroad, un chemin de fer clandestin mis en place par les abolitionnistes que l’auteur a imaginé construit sous terre, apportant à son récit une touche fantastique et métaphorique. Au fur et à mesure de son périple, elle est confrontée à un racisme qui revêt des formes différentes. En Caroline du Sud, par exemple, les Noirs qui sont « libres » sont ainsi soumis à un programme de « santé publique » destiné à stériliser les femmes !

Si son parcours est marqué par la traque obsessionnelle de Ridgeway, chasseur d’esclaves depuis qu’il a 14 ans, Cora fait aussi des rencontres lumineuses avec de bonnes personnes, noires et blanches, qui vont lui donner l’envie de se battre. Puis, il y a la figure exemplaire de sa mère, seule captive à avoir réussi à se sauver sans se faire reprendre.

Sans pathos, sans manichéisme (les Noirs en prennent aussi pour leur grade, il n’y a pas de raison qu’ils n’aient pas adopté les pires perversions de leurs « frères » blancs !), « Underground Railroad », roman extrêmement bien documenté, raconte certes l’histoire des esclaves mais aussi démonte le mythe américain et souligne que cette nation s’est constituée sur l’extermination des Indiens et sur l’asservissement des Noirs.

Des origines qui continuent à peser sur le fonctionnement de la société américaine…

EXTRAITS

  • On se venge les uns sur les autres quand on ne peut pas se venger sur ceux qui le méritent.
  • Dans un autre pays, ils auraient été des criminels, mais on était ici en Amérique.
  • Tel était l’authentique Grand Esprit, le fil divin qui reliait toute entreprise humaine : si vous arrivez à garder quelque chose, c’est que cette chose vous appartient. C’est votre bien : votre esclave, votre continent. L’impératif américain.
  • La terre qu’elle avait labourée et cultivée avait été une terre indienne. Elle savait que les Blancs se vantaient de l’efficacité des massacres, au cours desquels ils tuaient des femmes et des enfants et étouffaient au berceau leur avenir.
  • Dans la liberté comme dans la servitude, on ne pouvait séparer l’Africain de l’Américain.
  • Et l’Amérique est également une illusion, le plus grandiose de toutes. (…). S’il y avait une justice en ce monde, cette nation ne devrait pas exister, car elle est fondée sur le meurtre, le vol et la cruauté.

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