Critique – Il est des hommes qui se perdront toujours – Rebecca Lighieri – P.O.L

Critique – Il est des hommes qui se perdront toujours – Rebecca Lighieri – P.O.L


« Qui a tué mon père ? ». Ainsi commence l’incroyable histoire racontée par le plus âgé des fils du mort, une belle ordure que tout le monde détestait.

Quartiers nord de Marseille dans les années 1980. Karel, Hendricka et Mohand vivent dans une famille déglinguée et rongée par la drogue. Si les deux premiers sont beaux comme le jour, le cadet souffre de multiples problèmes : « malformation cardiaque, déficience auditive, fente palatale, imperforation de l’anus… ». Alors que Karl le patriarche tente d’exploiter les atouts de ses aînés en leur faisant courir les castings, il va s’acharner sur le dernier à coups d’insultes et de torgnoles. Mohand se réfugiera dans les bras de Loubna la mère qui trouvera dans les déficiences de son benjamin un sens à son existence et une manière d’être enfin utile.

Comment peut-on s’en sortir quand on vit dans la misère et sans affection ? La grâce de la fille va faire sensation au cinéma ; Mohand va intelligemment tirer parti de ses défauts et de ses dons de guérisseur. Quant au narrateur, il craint d’avoir hérité des gènes de violence de son père. Avec lui, nous allons vivre avec les marginaux et les laissés-pour-compte qui essaient tant bien que mal de sortir de leur condition comme les rappeurs qu’ils écoutent en boucle. Dans ce roman d’apprentissage, il y a de la fureur, de la haine mais aussi de l’amour, de la poésie et de la joie, celle que diffusent les Gitans du « passage 50 » que Karel fréquente.

Et, comme dans tous les récits de Rebecca Lighieri, le pseudo, ou d’Emmanuelle Bayamack-Tam, le vrai nom, il est question de différences que l’on tente, malgré les vicissitudes, de transformer en atouts. Il faut alors une grande capacité de résilience car l’enfance marque à tout jamais l’adulte en devenir. « La seule chose qui dure toujours, c’est l’enfance, quand elle s’est mal passée » écrit l’auteure.

EXTRAIT

L’amour éternel, c’est des conneries. C’est la haine, qui est éternelle.

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