Critique – La Bonne nouvelle – Jean-Baptiste de Froment – Anne Carrière
« Monsieur Paul, il est ressuscité ! » s’exclame Bernadette, la cuisinière des Larmencour. Trois jours après son enterrement, le châtelain de Doligny, petite bourgade du Bourbonnais, est de retour parmi les vivants. Des témoins en attestent.
Hermine, sa veuve peu éplorée et sexagénaire affriolante, n’en croit pas un mot.
Pourtant, le tombeau est bien ouvert et le cadavre a disparu. C’est un canular de mauvais goût pense la femme du seigneur local, une transfuge de classe née dans un quartier de Montluçon qui s’est glissée avec aisance dans les habits de la petite noblesse de province.
Pour affirmer son rang, elle arbore une « longue pelisse » qui lui donne l’impression que les animaux utilisés pour sa fabrication ont été « personnellement sacrifiés » pour elle.
Malgré ses airs ostentatoires, elle a de l’humour et n’est pas dupe du monde qu’elle a intégré en épousant Paul qui lui aussi détonne dans le milieu ultra-conservateur et catholique où il a grandi.
Ce grand gaillard est un épicurien qui croque la vie à pleines dents. Mais depuis quelque temps, ses longues absences étonnent son épouse…
Mais revenons au ressuscité qui se baladerait dans la nature. Alors que les gendarmes font chou blanc, le « miracle » attire des foules en mal de croyances.
L’affluence est telle que le Vatican dépêche un émissaire pour démystifier la supercherie. Débarque alors le magnétique Benjamin Spark pour lequel Hermine va en pincer.
Dans une écriture alerte qui faisait déjà mouche dans « État de nature », Jean-Baptiste de Froment nous rappelle que, pour vivre, les hommes, contrairement aux animaux, ont besoin qu’on leur raconte des histoires. Même si celles-ci sont insensées. Il n’y a qu’à voir le succès des thèses complotistes, des sectes et du déni de la réalité où la rationalité est mise à mal.
L’auteur sonde aussi notre fascination pour le mal et prend le contre-pied de notre quasi-addiction en proposant une fable valorisant le Bien, la tolérance, la bienveillance, l’empathie… Et ce, sans aucune mièvrerie.
À méditer alors que les conflits armés se multiplient.
EXTRAITS
- C’est toujours comme ça avec les morts : on a l’impression qu’ils n’ont jamais été vivants.
- L’aristocratie n’est qu’une bourgeoisie qui a réussi à faire oublier la bassesse de ses origines.
- Ce qui nous tient de peuple aujourd’hui, c’est contre la vérité qu’il s’insurge.
- Un mensonge affirmé avec suffisamment de constance, par un nombre suffisant de gens, cela devient une vérité.
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