Critique – La cuisinière d’Himmler – Franz-Olivier Giesbert – Gallimard

Critique – La cuisinière d’Himmler – Franz-Olivier Giesbert – Gallimard


2012 à Marseille. Rose, 105 ans et toujours non pied bon œil, tient « La Petite Provence », un restaurant où elle concocte de bons petits plats qui ont fait sa réputation.

Car c’est en partie grâce ses talents culinaires et à son physique avantageux qu’elle traversa la violence du vingtième siècle avec la légèreté d’un papillon.

Il est vrai que la dame a de la ressource. Dotée d’un solide sens de la dérision et d’une intelligence supérieure à la moyenne, elle est douée d’un impressionnant instinct de survie et d’une formidable capacité d’adaptation.

Née au bord de la Mer Noire en 1907, elle est d’origine arménienne. Pas de chance de voir le jour quelques années avant le génocide de son peuple par l’Empire ottoman ! Forcément, Rose en réchappe et part pour un périple qui durera toute sa vie de la Turquie à la France en passant par l’Allemagne et la Chine.

Pendant ce siècle agité, elle pourra assouvir sa soif de vengeance pour éliminer ceux qui ont nui aux siens…

De nombreuses péripéties rythment une existence que FOG dévoile avec un vrai talent de conteur et un humour féroce : elle est enrôlée dans un harem, déflorée à 10 ans et devient, quelques années plus tard, la cuisinière du Reichsführer SS Himmler ! C’est l’occasion pour elle d’observer le quotidien des Nazis et de s’étonner du caractère souffreteux de Hitler et du physique ingrat de la plupart des proches du peintre raté qui ne correspond en rien aux critères d’une race pure.

Lucide sur tous les totalitarismes, qu’ils s’appellent nazisme, communisme ou maoïsme, Rose porte sur son environnement un regard plein de lucidité et de fraîcheur.

Rose ne serait-elle pas une sorte de double de l’auteur, une éternelle amoureuse qui n’hésite pas à régler ses comptes avec des personnages réels aussi ambigus que Sartre qui aurait sablé le champagne avec les Nazis ?

EXTRAIT

– Quand on regarde tout le temps la télévision, c’est qu’on va mourir. Je ne sais pas s’il y a un lien de cause à effet, mais l’expérience m’a appris qu’elle était l’antichambre de la mort.

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