Critique – Le bonheur national brut – François Roux

Critique – Le bonheur national brut – François Roux


De François à François. De Mitterrand à Hollande. 1981, c’est l’année où le peuple de gauche va voir son rêve se concrétiser avec l’élection de l’homme du programme commun. Pour Paul, Rodolphe, Benoît et Tanguy, les quatre amis bretons qui vont construire l’histoire de ce roman de près de 700 pages, c’est aussi l’année du bac et de la séparation.

Paul part à Paris pour préparer le concours d’entrée à la fac de médecine. C’est la volonté de son père, un gynécologue autoritaire engoncée dans ses certitudes de petit-bourgeois de province. Mais le fils va s’orienter plutôt vers une carrière de comédien et d’auteur dramatique et affirmer une homosexualité jusqu’alors latente.

Rodolphe, fils d’ouvrier communiste, va s’engager dans le combat de la deuxième gauche représentée par Michel Rocard. Il « reniera » ses origines populaires en épousant la délicieuse Alice, fille d’un milliardaire véreux et le milieu de la gauche « caviar ». Mais on reste toujours prisonnier de son éducation…

Benoît, un orphelin élevé par ses grands-parents, est le seul à rester en Bretagne. Après une expérience malheureuse pour un journal local, il poursuit sa passion pour la photographie.

Quant au brillant Tanguy, il intègre une prestigieuse école de commerce.

La première partie consacrée à l’entrée du quatuor dans la vie adulte s’arrête en 1984. Un an avant, le gouvernement avait pris le virage de la rigueur.

C’est en 2009 que nous retrouvons les quatre camarades qui, pour certains, se sont un perdus de vue. Paul multiplie les conquêtes masculines et végète en tant qu’acteur.

Rodolple, le plus attachant des personnages (avec son père Pierre et son épouse Alice) à mon sens, poursuit son ascension politique.

Benoît est un photographe célèbre

Tanguy travaille pour un grand groupe américain.

Je ne rentrerai pas dans le détail de leur parcours afin de ne pas déflorer le suspense.

Plus que le récit d’une amitié, « Le bonheur national brut » est surtout une description très juste et bien documentée d’une génération qui, pleine d’espérance au sortir de l’adolescence, a perdu ses illusions. Le chômage galopant, la paupérisation des classes moyennes, la mondialisation effrénée, la désindustrialisation du pays, la domination de la finance, l’insécurité, la progression du communautarisme, la montée des extrêmes sont passés par là.

Extrait 

« Nous avions tellement voulu grandir et nous frotter à la vie que nous avions oublié de préserver la part la plus belle de nous-mêmes : notre innocence » (p. 336).

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