Critique – Le Convoi – Beata Umubyeyi Mairesse – Flammarion

Critique – Le Convoi – Beata Umubyeyi Mairesse – Flammarion


Printemps-été 1994 au Rwanda. Trois mois pour décimer des centaines de milliers de Tutsis (entre 800 000 et un million).

Mille enfants, une goutte de vie dans un océan de cadavres, ont été sauvés, exfiltrés vers le Burundi par des convois affrétés par l’ONG suisse « Terre des hommes ».

Bien que cette opération ait été réservée aux enfants de moins de douze enfants, Beata Umubyeyi Mairesse, quinze ans, et sa mère firent partie du convoi du 18 juin. Pourquoi ?

Treize ans après, l’autrice se met en quête d’une hypothétique liste des petits rescapés. En contactant des journalistes de la BBC présents sur le terrain, elle entre en possession d’une vidéo et de quatre photos sur lesquelles elle ne figure pas. Qu’importe, elle persévère dans ses recherches pour retrouver les survivants du massacre et, au-delà, découvrir la chaîne humaine qui s’est mise en place pour organiser le sauvetage.

Son parcours, dans un premier temps personnel, touche alors à l’universel.

Le titre du récit fait immédiatement penser au « Convoi du 24 janvier 1943 » de Charlotte Delbo qui rend compte de la barbarie nazie.

Quelles que soient les époques, quelles que soient les latitudes, les génocides se ressemblent. Leurs victimes sont liées par une « communauté de destin » et leurs voix, au lieu de se concurrencer, convergent.

Une autre raison motivant sa démarche est le constat que le génocide rwandais avait été raconté par des personnes étrangères au pays « dont la narration avait fini par s’imposer à tous ».

« C’est à nous, les victimes d’hier, de la raconter » affirme-t-elle tout en se désolant, avec Susan Sontag, de la manière dont les Occidentaux traitent l’Afrique en exploitant photos et films des victimes sans leur demander leur avis.

Cette histoire est même souvent manipulée. La France, qui porte une grande part de responsabilité dans les événements de 1994, en est un exemple frappant.

Avec ce témoignage bouleversant, Beata Umubyeyi Mairesse donne enfin la parole aux persécutés. Son récit est intelligent, courageux et indispensable.

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