Critique – Les hommes – Richard Morgiève – Joëlle Losfeld

Critique – Les hommes – Richard Morgiève – Joëlle Losfeld


Années 1970 à Paris, le plébéien, celui des petits voyous, et à Montreuil, celui qui, au-delà du périphérique, fait un pied de nez à la capitale qui s’embourgeoise.

Petit voleur de voiture, Mietek, gueule d’ange, vient de sortir de prison. Cet orphelin est un ancien alcoolique qui replonge quand la vie lui devient insupportable. Ce qui lui arrive assez souvent parce qu’il a vraiment une VDM entre ses larcins et des parties de jambes en l’air avec des putes dont il est parfois le mac. Même son amour pour Ming qui préfère les femmes est dans une impasse. Cora, l’enfant innocente, va-t-elle sauver le voyou désabusé au grand cœur qui rebondit sur les murs de sa prison intérieure comme une boule de babasse (flipper en langage familier) ?

Ses rencontres avec deux frères complètement frappés, des flics barbouzes qui profitent de leurs hauts faits d’armes dans la Résistance, les deux Mohammed et la famille Cheval (référence au roman éponyme édité en 2009 ?) sont l’occasion de parler d’amitié, de fraternité, de sincérité et de fidélité. Sans oublier Madame Test, sa charmante voisine proche de la mort.

Dans une langue parlée, fleurie, parfois argotique, souvent crue, « Les hommes » est l’histoire d’un garçon à l’ancienne mais « fabricant de malheur », respectueux du code d’honneur qui écoute dans sa voiture « Classe tous risques » de José Giovanni lu par une amie russe et qui assiste à l’effondrement d’un monde où on pouvait fumer dans les lieux publics, même dans les hôpitaux !

Nous aussi assistons avec un certain pincement nostalgique au cœur à la disparition d’une époque où les hommes étaient des vrais hommes, les femmes toutes des putes et les Arabes des « bicots »… Un brin misogyne, raciste et peu politiquement correct n’est-ce pas !

Mené à un rythme haletant, presque haché à la manière d’un film d’action qui impose son tempo, le roman noir de Richard Morgiève est aussi un hommage à un Paris populaire devenu un musée.

Merci à Babelio et à Joëlle Losfeld Éditions de m’avoir envoyé ce livre.

EXTRAITS

  • C’était quoi, mon avenir dans ce putain de pays ? Fréquenter les Mohammed ? Le poulet rôti tous les dimanches avec Madame Test ? Chourer les bagnoles pour les frères Brun ?
  • Tout était vraiment vide, sale, inutile. C’était moche d’avoir un cerveau et de réfléchir.
  • Les mecs autour de moi parlaient politique et foot : les cons avaient besoin de parler à des cons de sujets cons.
  • Ah pitié, que les gentils crèvent et nous laissent nous dévorer, nous les autres.
  • Qu’est-ce qui s’était passé dans cette famille pour qu’ils soient tous aussi malheureux et fous ?
  • Tout me ramenait à moi, rien qu’à moi – être orphelin était un vice dont on ne pouvait se défaire.
  • Les livres permettaient aux cons et aux rêveurs de s’abstraire du monde réel, de vivre sous d’autres cieux, une autre vie.
  • Seulement comment satisfaire le besoin d’être ce qu’on n’était pas.
  • Le monde moderne avançait sans répit, il restait de l’ancien des cicatrices et de mauvais rêves, des types comme moi.
  • Un flic m’a souri… J’étais en train de passer du mauvais côté.
  • Je me suis souvenu de la fin de Touchez pas au grisbi, à ce que pensait Max-le-Menteur : « J’étais plus des leurs déjà ; le monde des caves m’attendait là, dehors. » C’était valable pour moi.

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