Critique – Quand le diable sortit de la salle de bain – Sophie Divry

Critique – Quand le diable sortit de la salle de bain – Sophie Divry


Bien qu’il cède à la mode agaçante des titres à rallonge, ce roman de l’auteur de « La condition pavillonnaire » est un petit bijou d’humour et d’inventivité.

Sophie est une écrivaine en panne d’inspiration. Et comme tout un chacun le sait, l’écriture ne nourrit pas sa femme.

Vivant dans un studio mal chauffé de Lyon qui engloutit ses maigres allocations chômage, elle se nourrit, mal, de biscottes, de boîtes de raviolis et autres produits déséquilibrés et hypercaloriques. Bref, c’est le règne de la malbouffe. Peu à peu, elle sombre dans la dépression et perd toute énergie pour décrocher un job qui lui permettrait d’avoir une vie plus décente.

Éloignée de sa famille qui vit dans la région de Montpellier, elle garde de son enfance une nostalgie qui l’empêche de se projeter dans l’avenir.

Heureusement, ou pas, elle a un ami, Hector, qui la sort de sa solitude. Même si cet obsédé sexuel lui gâche parfois l’existence. Et puis il y a Lorchus, son démon personnel, qui intervient dans l’écriture du livre.

Tout en décrivant avec justesse et malice la condition d’une femme intelligente et attachante s’enfonçant dans la misère, « Quand le diable sortit de la salle des bains » dénonce, sur le ton de la plaisanterie l’administration kafkaïenne de Pôle Emploi auxquels sont confrontés les chômeurs.

Une manière astucieuse de fustiger avec légèreté les travers de nos sociétés contemporaines : la déréliction, Facebook qui nous fait croire que nous avons plein d’amis et que nous ne sommes pas seuls, les petits boulots mal payés et déconsidérés…

EXTRAITS

  • « Dans la catégorie des pires boulots du monde, téléprospecteur peut concourir pour la palme interplanétaire : c’est le métier de l’inutilité et de l’emmerdement de son prochain joint à la pollution sonore et à la déformation du langage par la communication »
  • « (…) ces petits péteux qui mènent une ascétique thèse sur Spinoza pour finir grassement rémunérés sur une chaîne câblée »
  • « Sans doute le conditionnel a-t-il été inventé par une famille pauvre pour mieux supporter sa condition »
  • « Ce n’est pas le chômage qui est drôle, c’est la littérature qui peut être une fête »

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