Laurent Gaudé à la librairie Les Temps Modernes à Orléans le 20 septembre 2016
« Est-ce qu’écrire est une bataille ? » « attaque » Sophie Todescato, gérante de la librairie Les Temps Modernes à Orléans comme un clin d’œil au titre du dernier opus de Laurent Gaudé.
« Oui » répond sobrement celui qui a mis près de deux ans à écrire « Écoutez nos défaites », un récit polyphonique où se mêlent personnages historiques et anonymes.
En s’emparant des figures de Hannibal, Grant et Haïlé Sélassié, il illustre trois types de guerres différents : la guerre d’expansion, la guerre civile et la guerre coloniale.
Écrire sur la guerre, c’est aussi s’interroger sur le sens de la victoire, de la défaite. « O mort, où est ta victoire ? » peut-on lire dans la Bible.
Bien qu’il fût battu, c’est Hannibal dont l’Histoire se souvient et pas Scipion.
QU’EST-CE QU’UNE VICTOIRE DANS UNE GUERRE CIVILE ?
Plus près de nous, si Grant a mené un juste combat, l’auteur s’interroge : « qu’est-ce qu’une victoire dans une guerre civile ? ».
Quant au négus, on se souvient de son discours devant la SDN dans lequel il enjoint la communauté internationale à l’aider dans son combat contre l’occupant fasciste. La postérité retiendra-t-elle sa position de résistant à la colonisation ou sa collection de 27 Rolls ? Alors que l’empereur d’Éthiopie s’enrichira aux dépens de son peuple, Grant sombrera dans l’alcoolisme.
Parallèlement à ces héros entrés dans la postérité, Laurent Gaudé introduit trois personnages actuels. « Il fallait une période contemporaine pour ouvrir sur autre chose que le champ strictement militaire, pour dire quelque chose de la défaite dans ce qu’elle a de personnel » explique-t-il. Et de mettre en scène une archéologue qui se bat contre la maladie et se désespère devant le pillage des plus belles œuvres du patrimoine mondial mais aussi un tueur de la République qui doute du sens de sa mission.
LA GUERRE A DISTANCE
Laurent Gaudé note que l’esprit de la guerre a évolué et que, avec les drones, le combat se fait à distance. « On peut être brutal à midi et embrasser ses enfants le soir » constate-t-il.
Enfin, celui qui se sent très concerné par la catastrophe de la migration déplore « le divorce entre la poésie et le peuple ». Ou sont passés les Aragon, les Eluard, les Pasolini ? « J’ai envie que sur le terrorisme, la barbarie, on entende des poètes ».
L’appel est lancé…
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