Critique – Madame Hayat – Ahmet Altan – Actes Sud

Critique – Madame Hayat – Ahmet Altan – Actes Sud


Écrit en Turquie pendant son incarcération qui dura près de trois ans après l’accusation d’avoir participé au putsch manqué du 15 juillet 2016, « Madame Hayat » est le récit d’un jeune homme prénommé Fazil qui, à la suite de la mort de son père, doit s’habituer à vivre dans la pauvreté.

Devenu boursier, il peut poursuivre ses études de lettres qui comblent sa passion des livres.

Pour se nourrir et payer son modeste loyer dans une colocation où il croise, entre autres, un travesti, un gigolo, une petite fille de cinq ans, un journaliste opposant au gouvernement, il devient figurant pour la télé. C’est dans le studio de tournage qu’il fait la rencontre de Madame Hayat, une femme plantureuse plus âgée qui devient rapidement sa maîtresse.

Il développe une dépendance à sa sensualité, à son apparente joie de vivre, à sa désinvolture, à son caractère passionné, à sa liberté, tout en entretenant une relation avec une étudiante de son âge avec laquelle les rapports sont plus cérébraux que charnels.

Alors que la répression du régime gronde, Fazil vit dans une bulle imperméable aux questions politiques qui agitent le pays.

Malgré sa belle écriture, je suis un peu passée à côté du dernier roman d’Ahmet Altan, hormis de ses digressions philosophico-littéraires toujours pertinentes.

Le narrateur, ex-rejeton de riche, égoïste, satisfait de sa virilité naissante, aveugle à la psychologie des femmes de sa vie et honteux de son histoire avec sa vieille amante, m’a peu touchée.

Seule la figure de la mystérieuse et solitaire Madama Hayat, férue d’anthropologie, de documentaires animaliers (Fazil dit d’elle : « elle ressemblait beaucoup plus à la nature qu’aux êtres humains ») et qu’on soupçonne d’avoir un lourd passé, sauve ce récit finalement un peu convenu, ainsi que celle de Madame Nermin, une professeur de littérature provocante et courageuse qui voit dans la fiction une échappatoire à l’existence.

EXTRAITS

  • Le « moment présent », ce noyau du temps qui passe, s’affranchissait du passé comme de l’avenir pour devenir la mesure infinie de l’existence.
  • Grâce aux écrivains, nous voyons dans la littérature ce qui dans nos vies nous échappe.
  • Ça fait longtemps que Dieu regrette sa création.
  • Il ne faut avoir peur de rien dans la vie… La vie ne sert à rien d’autre qu’à être vécue.

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