Critique – Nickel Boys – Colson Whitehead – Albin Michel

Critique – Nickel Boys – Colson Whitehead – Albin Michel


« Même morts, les garçons étaient un problème ». L’incipit du dernier roman de Colson Whitehead sonne comme un uppercut.

La description, dans le prologue, de la découverte, au début de notre siècle, d’un cimetière clandestin à proximité d’une maison de redressement de Floride nous saisit d’effroi. Elle souligne combien la condition des prisonniers, enfants et adolescents, qu’ils soient orphelins ou coupables de délits mineurs, fut épouvantable. Malnutrition, insalubrité, insultes, travaux forcés, sévices, viols et… assassinats sont le quotidien des jeunes internés.

Nous sommes dans les années 1960. Elwood Curtis vit à avec sa grand-mère à Tallahassee. Le jeune Noir est bercé par les discours de Martin Luther King qui éveille sa conscience politique et par le livre « Chronique d’un pays natal » de James Baldwin que lui prête l’un de ses professeurs, le formidable Mr Hill. Bon élève toujours plongé dans son encyclopédie, il est destiné à poursuivre des études universitaires mais une erreur judiciaire, qui le conduira à Nickel, va bouleverser le cours de son existence.

L’établissement, présenté comme une école alors qu’il n’est qu’une « sordide prison », reflète le fonctionnement de la société américaine qui ségrègue les Noirs. Elwood y découvrira une espèce de goulag mais aussi l’amitié avec Turner, un courageux garçon qui rêve de fuir cet endroit qui tue l’enfance à petit feu. Il y perdra aussi ses illusions. Il ne peut plus acquiescer à la phrase du révérend King : « Jetez-nous en prison, nous continuerons à vous aimer ».

Pour composer son livre, Colson Whitehead s’est inspiré d’une véritable école disciplinaire, la « Dozier School for Boys », qui ouvrit ses portes en 1899. Le résultat est mitigé car l’auteur semble hésiter entre le documentaire et le roman. L’écriture est plate et un brin désuète. La plupart des personnages manquent de relief. Bref, il ne suffit pas de dénoncer le racisme pour accoucher d’une œuvre digne de ce nom. Contrairement à « Underground Railroad », lui aussi auréolé d’un Prix Pulitzer cette fois-ci mérité, « Nickel Boys » manque de souffle.

Seules les dernières pages m’ont touchée.

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