Critique – Danse avec la foudre – Jérémy Bracone – L’Iconoclaste

Critique – Danse avec la foudre – Jérémy Bracone – L’Iconoclaste


Encore une victime de la mondialisation, encore un territoire perdu de la république ! Villerupt, chef-lieu de canton du département de Meurthe-et-Moselle, voit dans les années 1980 ses hauts fourneaux tomber « comme des quilles ».

« L’eldorado du fer » a vécu. Dans son sillage, les usines ferment après avoir touché de juteuses subventions publiques. Toujours plus nombreux, les actifs se rendent au Luxembourg ou en Belgique pour y travailler.

Cette petite ville de près de 10 000 âmes, on l’appelait La Petite Italie. A la belle époque, on recensait « une centaine de bistrots ». Aujourd’hui, on les compte « sur les doigts d’une main ».

Heureusement, il y a le Spoutnik squatté par une bande de potes en quête d’un peu de convivialité. Parmi eux, il y a Figuette, le fils de Fighetti, l’amoureux fou de Moïra qu’il épouse alors qu’elle attend un enfant de lui.

Moïra, la fantasque, la colérique, la séductrice, l’immature, la provocatrice, l’égocentrique en manque d’amour et de tendresse, la fille qui passe des heures devant la télévision à rêver à d’autres vies, la fugueuse qui se dérobe à ses responsabilités parce qu’elle est devenue mère trop jeune. Elle n’avait que 18 ans et « les enfants ne font pas d’enfants ». Pourtant, le brave Figuette a tout fait pour la garder. Il a inventé des mondes pour l’extraire d’un quotidien banal, des univers où elle devient une héroïne comme la Louise de « En attendant Bojangles » où chaque moment est une fête. Mais la réalité vous rattrape toujours et trop d’imagination, trop de passion peuvent conduire à la folie.

Si la relation toxique entre Figuette et Moïra m’a plutôt agacée tant cette gamine est insupportable, j’ai bien aimé la manière dont l’auteur, qui signe ici son premier roman sur le mode tragi-comique, décrit l’amitié et la débrouillardise de ces femmes et de ces hommes qui ne peuvent compter que sur eux-mêmes pour s’en sortir.

Ils ont la pauvreté joyeuse et c’est une belle leçon d’espoir.

EXTRAITS

  • Partout la terre est rouge de fer. Rouge, comme l’héritage communiste.
  • Elle a l’égoïsme de la tristesse.

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