Critique – Et je t’emmène – Niccolo Ammaniti – Pavillons poche

Critique – Et je t’emmène – Niccolo Ammaniti – Pavillons poche


Dans la petite présentation que l’éditeur lui consacre, Niccolo Ammaniti est présenté comme le chef de file de la « littérature cannibale ». Késaco ?

D’après un article du « Monde des livres » daté du 7 juillet 2011, il s’agirait d’une « mouvance » prônant un « nouveau réalisme » destiné à « remettre en question le caractère conventionnel et aseptisé de la littérature dominante ». Ses représentants sont « décidés à aborder sans gants un perçu comme dégradé, vidé de sens et prisonnier de la violence, ils écrivaient des histoires souvent très crues qui recyclaient, avec beaucoup d’ironie, tous les langages de la télévision, de la publicité et des cultures juvéniles ».

Plutôt qu’un véritable mouvement littéraire, le « cannibalisme » serait plutôt un coup marketing.

Ce qui n’empêche pas d’apprécier la production de son mentor. Je pense au magnifique « Comme Dieu le veut » qui se vit décerner le prix Strega en 2007.

Dans « Et je t’emmène », publié en 1999, Niccolo Ammaniti fait le portrait d’une Italie qui ne ressemble pas à celle des cartes postales. Ischiano est un petit village de la Toscane. C’est l’hiver, il pleut sans cesse. Les hommes sont des brutes alcooliques obsédées par le sexe et lâches. Les femmes sont soumises. L’horizon est bouché. Seule une petite lumière brille au fond de cette noirceur. C’est Pietro, 12 ans. Au tout début du roman, on apprend que le pré-adolescent redouble. On revit alors les mois qui ont précédé cet événement. Pietro est délaissé par ses parents et est le souffre-douleur du collège. Harcelé par un trio de gamins bêtes et méchants, il est forcé à commettre l’irréparable. Heureusement, il y a Gloria, sa meilleure amie dont il est secrètement épris.

Parallèlement au récit du calvaire du garçon, on suit les aventures et les infortunes de Graziano, la quarantaine, « sex-symbol des campings, mister Conquetador, les cheveux oxygénés et des boucles d’oreilles, un animateur des villages de vacances Valtur ».

Après un échec sentimental avec une bimbo décérébrée qui se rêve en starlette, le bellâtre s’amourache de la prof d’italien de Pietro, Flora, encore vierge à 32 ans et chargée de s’occuper de sa mère mourante…

Mené à 100 à l’heure au rythme de REM et des Gispsy Kings, « Et je t’emmène » est le roman des désillusions et de l’absence de rêves. Si le texte est souvent drôle, c’est d’humour noir qu’il s’agit.

Certains s’en sortiront. Parce qu’ils le méritent. Il y a finalement une morale dans toute cette crasse.

 

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