Critique – L’amie prodigieuse – Elena Ferrante – Gallimard
Lenù, Lila. Lila, Lenù. Avec « L’amie prodigieuse », premier tome de la trilogie d’Elena Ferrante, commence le récit d’une amitié unique.
Nées toutes les deux dans un quartier pauvre de Naples, loin de la lumière de la mer, elles se révèlent, soutenues par une institutrice comme on aimerait en rencontrer plus souvent, des élèves douées pour les études. Mais Lila, certainement la plus intelligente du duo et la plus douée pour raconter des histoires, va choisir de rester dans son milieu d’origine, un univers où la violence est le seul moyen de communiquer, où le plus fort gagne toujours et où la mafia fait régner l’ordre.
Dans cet environnement délétère, Lila et Lenù se distinguent. Même si la première, à la beauté renversante alors qu’elle fut un vilain petit canard, se résigne à ne pas franchir la frontière vers la liberté, son fort caractère, parfois pris pour de la méchanceté, en fait un être différent. Elle est prodigieuse au sens étymologique, à la fois divine et monstrueuse. Quant à la seconde, la narratrice du roman, elle s’échappera de sa condition grâce à une scolarité poussée. Mais malgré sa réputation d’intellectuelle, elle restera toujours soumise à sa camarade. Cette apparente servilité se double d’une opiniâtreté et d’une volonté qui vont la sauver. C’est également son amour pour le beau Nino, lui aussi devenu un étranger au milieu dans lequel il est né par son engagement politique, qui va la préserver de la médiocrité : une vie de tâcheron et un mariage avec un homme qu’elle n’aime pas et qui la frappe.
Lila n’échappera pas à cette fatalité qui guette les femmes de cette époque.
Roman social qui rappelle le cinéma italien néoréaliste avec son lot de pères laborieux et de femmes usées, le roman d’Elena Ferrante est un texte à la fois tendre et fort sur une amitié chaotique. L’auteur porte un regard tout en finesse sur l’enfance, cette période magique où l’on absorbe tout, le meilleur et le pire.
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