Critique – Patte blanche – Kinga Wyrzykowska – Seuil

Critique – Patte blanche – Kinga Wyrzykowska – Seuil


Dans la riche famille Simart-Duteil, il y a la mère Isabella, une flamboyante Italienne qui passe ses journées à lutter contre les marques du vieillissement.

Il y a Paul, l’aîné homosexuel et vilain petit canard, un influenceur politique qui peine à percer avec sa chaîne YouTube « Pol’Pot », Pot pour potins. Le quinquagénaire n’hésite pas à fricoter avec l’extrême droite pour développer ses projets.

Il y a Clothilde, desperate housewife hypocondriaque, mère de trois enfants, qui comble le vide de son existence en postant sur les réseaux sociaux des photos de plats qu’elle a réalisés et d’idées de décoration.

Il y a enfin Samuel, le cadet, chirurgien esthétique à la tête d’une clinique, qui n’hésite pas à rafistoler sa mère à coups de liposuccions quand sa peau fiche le camp. Il s’apprête à épouser une mannequin polonaise enceinte de ses œuvres.

Tout ce petit monde se prépare à fêter les soixante-dix ans de la daronne dans la propriété normande où celle-ci vit la moitié du temps.

Tout ce petit monde va jouer le jeu de l’entente familiale, sauf Paul, le mal-aîmé, qui excelle à mettre les pieds dans le plat.

Seul le patriarche manque à l’appel. Claude, magnat des autoroutes, est décédé quelques années plus tôt d’un cancer de l’œil. Isabella l’a remplacé par un certain Marco, « de quinze ans son cadet ».

En faisant du rangement dans les affaires de son père, Paul tombe sur une photo sur laquelle figurent une femme et un homme au visage indiscernable sur les genoux duquel un bébé est assis. L’individu au costume gris qui figure sur ce cliché pris à Damas, où Claude faisait du business, est-il son père ?

Nous le saurons rapidement. Le nourrisson a bien grandi. Il s’appelle Feras et annonce aux trois enfants « officiels » de Claude qu’il est leur demi-frère, qu’il souhaite quitter la Syrie pour rejoindre la France et, pour ce faire, qu’il a besoin d’aide.

Sur les conseils insistants de Paul, la fratrie décide de ne pas répondre à son appel au secours. Feras va alors se montrer menaçant, semant la paranoïa chez les Simart-Duteil qui se croient victimes d’un complot.

Contre l’adversité, il faut se serrer les coudes pense Paul qui transforme la maison familiale en bunker.

Premier roman déjanté et réjouissant faisant partie de la sélection 2023 du Prix Premières paroles, « Patte blanche » est un récit savoureux sur la comédie humaine qui sonde nos travers les plus minables.

Tous les personnages sont détestables et sont des miroirs de nous-mêmes avec nos petites lâchetés, nos trahisons, notre propension à médire, notre peur de l’étranger…

On rit beaucoup à la lecture de « Patte blanche » dont la narration est truffée de dialogues désopilants. Et la fin, modèle de twist, est surprenante.

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