Critique – Dictionnaire amoureux de la géopolitique – Hubert Védrine – Plon

Critique – Dictionnaire amoureux de la géopolitique – Hubert Védrine – Plon


On peut être amoureux de la mer, des arbres, de Paris ou encore de l’opéra. Mais « comment être amoureux de la géopolitique » se demande Hubert Védrine qui préfère évoquer, quand il s’exprime à propos de son dernier livre, un « Dictionnaire personnel et passionné ».

Celui qui a passé « dix-neuf années au cœur du pouvoir » dont cinq « à la tête du Quai d’Orsay » et qui a vécu de près la fin de la guerre froide et l’effondrement de l’URSS est certainement l’un des plus légitimes en France à se pencher sur une discipline qui étudie les « interactions entre la géographie, l’histoire et la politique internationale ».

Avec lucidité et à rebours de la doxa bien-pensante, il décrypte l’état du monde en faisant de multiples allers et retours dans le passé toujours source d’enseignements.

Il ressort des quelque 249 entrées un portrait réaliste et un peu inquiétant de notre l’environnement international à l’aube du 21ème siècle : la perte d’influence de l’Occident, et en particulier de l’Europe, au profit d’une Chine tentaculaire (routes de la soie…) ; la course aux ressources et minières qui portent en germe des différends entre états et une aggravation de l’état de notre planète (cf. l’Arctique) ; l’urgence écologique qui suppose une évaluation objective de la situation dans chaque pays (Hubert Védrine précise fort justement que la France, grâce à l’énergie nucléaire, émet beaucoup moins de CO2 que sa voisine allemande. Le pire est que près de 60% des Français croyaient en 2019 que le nucléaire émettait du CO2 !!!) ; la mémoire sélective et la lecture tronquée de l’histoire qui stigmatisent l’Occident comme seul responsable de l’esclavage alors qu’il a été malheureusement pratiqué partout et par tous mais, chut, il ne faut pas le dire ; le politiquement correct qui prend, sous le prétexte de ne pas blesser les minorités et les soi-disant stigmatisés, des proportions effrayantes (exemple de Justin Trudeau demandant de ne pas dire mankind, humanité, car il contient le mot man !!!) allant jusqu’à la cancel culture ;

Quelques bémols :

  • on aurait aimé que l’auteur approfondisse davantage les enjeux des « guerres » technologiques et spatiales
  • son « entrée » consacrée à la BD est un peu courte et datée. Pas un mot sur Joe Sacco…
  • une écriture un peu négligée avec une avalanche de phrases sans verbes et de points d’interrogation

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