Critique – Betty – Tiffany McDaniel – Gallmeister

Critique – Betty – Tiffany McDaniel – Gallmeister


« Betty » est pour le moment l’un des livres les plus bouleversants de la rentrée littéraire de septembre 2020 que j’ai lu.

C’est en s’inspirant de son histoire familiale et plus précisément de sa mère que Tiffany McDaniel a composé son roman.

Betty Carpenter, la narratrice, vient « d’une famille de huit enfants. Nombre d’entre eux sont morts dans leur première jeunesse ».

C’est dans un endroit incongru, un cimetière, que sa mère Alka, ravagée à jamais par l’inceste, et son père, un cherokee prénommé Landon, se rencontrent.

Après avoir bourlingué en fonction des opportunités d’emploi, les Carpenter posent leurs valises à Breathed, petite bourgade fictionnelle de l’Ohio, là où sont les racines de la mère. Betty a sept ans et voue une admiration sans limite à son géniteur, cet amoureux de la nature dont elle a hérité le physique et le goût pour les histoires inventées ou puisées dans la mythologie amérindienne car, parfois, pour rendre la réalité plus douce, le mensonge est salvateur.

Betty devient le réceptacle de la malédiction qui semble peser sur sa famille et des terribles secrets cachés et livrés par certains de ses membres. Pour mieux les exorciser et alléger le poids des souffrances, elle en fait la matière de récits qu’elle enferme dans des bocaux qu’elle enterre.

Paradoxalement, ce sont les drames et les confidences qui vont la construire sous le regard bienveillant et protecteur de Landon. Victime des racistes qui la rejettent à cause de sa peau trop foncée, la « Petite Indienne » comme son père l’appelle affectueusement est aussi consciente du terrible sort des femmes victimes du patriarcat, un état de fait qu’elle refuse.

Ode à la liberté, à la nature et à l’amour, « Betty », porté par une écriture lyrique entre légèreté et gravité, est un magnifique texte d’émancipation d’une enfant qui perd très vite son innocence pour devenir une jeune femme avec un avenir plein de promesses.

EXTRAITS

  • Pris entre Dieu et le Diable, l’arbre de notre famille a grandi avec des racines pourries, des branches brisées et des feuilles rongées par les champignons.
  • L’âme de mon père était d’une autre époque. D’une époque où le pays était peuplé de tribus qui écoutaient la terre et qui la respectaient.
  • Un arbre prêche mieux que n’importe quel homme.
  • Tu sais quelle est la chose la plus lourde au monde, Betty ? C’est un homme qui est sur toi alors que tu ne veux pas qu’il y soit.

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