Critique – Metropolis – Philip Kerr – Seuil

Critique – Metropolis – Philip Kerr – Seuil


« Metropolis » est le dernier roman de Philip Kerr décédé en 2018. Après son précédent opus intitulé « L’offrande grecque » qui se déroulait à la fin des années 1950, il plonge Bernie Gunther, son héros récurrent, dans le Berlin de l’année 1928.

Dix ans après l’Armistice, la ville ressemble à une Babylone moderne. Grouillante de prostituées, elle est le symbole de la décadence et certains ne supportent pas ce lupanar à ciel ouvert.

L’un d’eux a même trouvé la solution radicale en assassinant quelques gourgandines.

L’autre visage de la future capitale de l’Allemagne réunifiée est celui des estropiés de la Grand Guerre qui rappellent aux habitants la honte de la défaite. Un meurtrier, peut-être dégoûté par l’aspect des rues qui ressemblent « à un tableau de Brueghel », va commencer à régler leurs comptes à ces infirmes si disgracieux.

Bernie, fraîchement promu au sein de la Kripo, va mener l’enquête en s’immergeant dans les milieux les plus interlopes, une descente aux enfers qui ne tarira pas, bien au contraire, son penchant pour l’alcool fort.

Bien documenté, « Metropolis », clin d’oeil au film de Fritz Lang adapté d’un roman de Thea von Harbou également scénariste et que l’on croise dans le récit à l’instar d’autres personnages réels, pointe du doigt une Allemagne qui va bien mal et qui annonce la montée au pouvoir de Hitler à peine cinq plus tard. Histoire de mettre un peu d’ordre dans ce « grand magasin de la débauche » et de rassurer le teuton ordinaire, effrayé par le communisme et haineux envers les Juifs, qui aspire à une vie paisible.

Le sentiment de déshonneur, la rancoeur, la pauvreté avec la criminalité comme corollaire, voilà ce que le jeune Bernie contemple avec lucidité et un humour désabusé qui est déjà sa marque de fabrique.

Il ne sera pas le seul observateur des conséquences de l’humiliation de l’Armistice et du Traité de Versailles et de la montée inexorable du nazisme. Pendant ces années qu’on nommait « folles », Berlin fut un formidable vivier artistique et culturel. Les peintres George Grosz et Otto Dix exprimeront dans leurs tableaux le climat délétère de cette période. Quelques années plus tard, ils seront taxés de « dégénérés »…

EXTRAITS

  • En Allemagne, tous les pronazis étaient convaincus qu’un juif n’était qu’un communiste avec un grand nez et une montre en or.
  • Cette ville semble incarner l’esse,ce même de la véritable humanité.

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