Critique – Les vestiges du jour – Kazuo Ishiguro – Gallimard

Critique – Les vestiges du jour – Kazuo Ishiguro – Gallimard


Stevens a été majordome toute sa vie.

Avant la guerre, il a servi Lord Darlington. Il est désormais le butler d’un riche américain dont il ne comprend pas la propension à badiner, lui qui incarne le sérieux à l’anglaise. Décontenancé par son nouvel employeur qu’il n’est pas certain de pouvoir satisfaire, il accepte de prendre quelques jours de vacances. Destination la Cornouailles pour y retrouver Miss Kenton, une ancienne « collègue » au caractère bien affirmé.

Durant les quatre jours de son périple, il fait la rencontre de « petites gens », lui qui a toujours côtoyé le gratin, il revient sur son passé et se demande s’il a été un « grand » majordome, s’il a été digne de sa fonction.

Il a fait sienne la devise de la reine Victoria : « never explain never complain ».

Programmé comme un robot pour servir les plus grandes maisons, le majordome, dont Stevens est un archétype parfait, renonce à toute vie privée et ne doit jamais manifester ses opinions ou ses émotions. Quitte à ne pas accompagner un père qui agonise ou à refuser de juger un patron qui fricote avec les nazis.

De la lâcheté ? Non, de la dignité pense celui qui ne lâche jamais prise, refusant l’affection qu’aurait pu lui apporter Miss Kenton. A-t-il seulement compris les avances que l’intendante lui a faites en se rappelant ses propos à la fois ambigus et sensuels ?

Sans l’avouer, en partant sur la route, Stevens ne veut-il pas vivre enfin enfin le grand amour qu’il a refusé ?

« Les vestiges du jour » est une très jolie lecture au charme suranné sur un homme qui a fait le choix du sacrifice par ce goût du travail bien fait que lui a transmis son géniteur. Une forme de servitude volontaire qui fait un peu peur…

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