Critique – Shuggie Bain – Douglas Stuart – Globe
Récit de l’attachement d’un fils à sa mère et véritable diatribe contre l’alcoolisme, « Shuggie Bain » nous emmène dans l’Ecosse des années 1980. En 1979, Margaret Thatcher a été élue Premier Ministre du Royaume-Uni et entend bien mener une politique ultralibérale avec pour conséquences la désindustrialisation de son pays et l’explosion du chômage.
A Sighthill, quartier de Glasgow construit sur les décombres de bidonvilles, Shuggie vit dans l’appartement de ses grands-parents avec sa mère Agnes, son père Hugh, sa sœur et son frère nés d’une première union. Il grandira ensuite à Pithead, un coron qui abrite des laissés pour compte du capitalisme triomphant.
Il a quatre ans quand nous faisons sa connaissance et on dit déjà de lui : « il est pas net ». Solitaire, précieux, maniant la langue de Shakespeare avec distinction, il est le souffre-douleur de ses « camarades » de classe qui le traitent de « tapette ». Il a un seul amour : sa mère, une mère qui donne le change sur sa pauvreté et son alcoolisme en se vêtant comme une bourgeoise, en se donnant de grands airs et en utilisant un vocabulaire choisi.
Mais son stratagème ne dupe personne. Résultat : le second époux, un sale type qui ne fait rien pour l’aider à sortir de sa dépendance en la battant et en la trompant, prend la tangente ainsi que la fille qui se marie pour échapper à l’ambiance délétère du foyer.
En dehors du grand frère qui se réfugie dans le dessin, Shuggie reste seul avec sa mère, un tête à tête qui prend la forme d’un sacrifice, la mère devenant un enfant, pour celui qui se sait différent.
Et c’est le cœur serré que nous partageons la vie fusionnelle d’une mère et d’un fils inadaptés au milieu dans lequel ils sont nés où la misère le dispute à la méchanceté et à la vulgarité.
Ce roman noir en partie autobiographique a été justement auréolé du Man Booker Prize en 2020.
EXTRAIT
Elle buvait pour s’oublier, parce qu’elle ne savait plus comment repousser la douleur et la solitude.
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