Critique – Une douce lueur de malveillance – Dan Chaon – Albin Michel

Critique – Une douce lueur de malveillance – Dan Chaon – Albin Michel


« On rencontre sa destinée par les chemins qu’on prend pour l’éviter ». Cette phrase extraite de la fable « L’horoscope » de Jean de La Fontaine placée en exergue du dernier roman de l’Américain Dan Chaon résume la complexité de son projet littéraire.

Dustin Tillman, psycholoque quadragénaire, mène une petite vie tranquille avec son épouse et ses deux fils lorsqu’une nouvelle va bouleverser cette quiétude qui rappelle combien les apparences sont trompeuses. Russell, alias Rusty, son « frère » adopté par ses parents et accusé de les avoir assasinés ainsi que d’autres membres de s

la famille va sortir de prison. Trente ans après les faits. Ce garçon étrange, toxique et cruel a en effet été innocenté. Cet événement va faire ressurgir le passé et souligner combien la mémoire peut être défaillante et déformée, combien nous nous tentons de nous donner le beau rôle, à mentir pour cacher la vérité et, enfin, combien l’innocence de l’enfance est bien un mythe

Parallèlement à la remise en liberté de Rusty, on retrouve des cadavres d’étudiants morts noyés. Aqil, l’un des patients de Dustin et ancien flic, entraîne son thérapeute dans la quête des responsables de ce qu’il pense être des assassinats commis par des satanistes.

De quoi faire perdre les pédales au psy qui ne parvient pas toujours à finir ses phrases (peut-être pour fuir la mort, la fin ?). D’autant plus que son épouse se meurt d’un cancer et que l’un de ses fils sombre dans la drogue.

Roman choral (habilement, Dan Chaon va même jusqu’à scinder certaines pages en colonnes pour donner les différentes versions vécues par ses personnages) qui donne la parole aux différents protagonistes dont les cousines du « héros », des jumelles qui semblent tout droit sorties d’une histoire de Joyce Carol Oates ou de Laura Kasischke, « Une douce lueur de malveillance » est un texte machiavélique et manipulateur aux accents de thriller psychologique qui se joue de la réalité, toujours subjective. Du grand art.

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