Critique – La Longue-vue – Elizabeth Jane Howard – La Table ronde

Critique – La Longue-vue – Elizabeth Jane Howard – La Table ronde


Elizabeth Jane Howard (1923-2014) est certainement l’une des écrivaines anglaises les plus sous-estimées du XXe siècle.

En France, elle s’est fait connaître avec la tétralogie « La Saga des Cazalet » dont le premier opus a été publié en 2020 par la maison d’édition La Table ronde qui poursuit, avec « La Longue-vue », son travail de réhabilitation d’une autrice si habile à disséquer les sentiments et les relations humaines.

La scène inaugurale se déroule en 1950 dans une maison d’un quartier cossu de Londres. Le couple que forment Antonia et Conrad Fleming depuis plus de vingt ans s’apprête à célébrer les fiançailles du fils aîné.

Comme à son habitude, le paterfamilias, toujours sûr de lui, s’amuse à écraser avec cruauté ceux qui n’ont pas son sens de la repartie.

Quant à sa femme, intérieurement affligée par son comportement, elle reste digne en toutes circonstances, habituée qu’elle est à maîtriser ses émotions et la peur qu’il lui inspire.

Comment en est-on arrivé là ? Comment un mariage qui aurait dû être heureux a-t-il pu sombrer à ce point dans une incommunicabilité et une incompréhension conduisant les époux à échanger au moyen de lettres ?

Dans un compte à rebours qui nous emmène en 1942, en 1937, en 1927, puis en 1926, à des moments essentiels dans la vie d’Antonia, Jane Elizabeth Howard retrace son parcours.

À dix-sept ans, Antonia est une oie blanche subissant l’indifférence de son intellectuel de père et les moqueries d’une mère toujours avide de séduire.

Une relation avec un homme plus âgé sera le déclencheur de son mal-être et d’une vie fondée sur le malentendu.

Avec une grande finesse psychologique et une grande modernité (le livre a été édité en 1956 en Grande-Bretagne), l’autrice fait le constat de la condition de la femme, réduite à un objet de désir et à sa capacité soi-disant innée à « tenir une maison », que les hommes s’emploient à modeler.

Malgré quelques longueurs, « La Longue-vue » est un roman intelligent et poignant avec un sens de l’introspection singulier qui est la marque de Jane Elizabeth Howard si lucide sur la comédie humaine faite de faux-semblants et de mensonges.

EXTRAITS

  • En la considérant, Mr Fleming trouvait difficile de croire à L’Origine des espèces.
  • Il était fatal, songeait-elle, de grandir aux côtés de quelqu’un.

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