Critique – Lionel Asbo, l’état de l’Angleterre – Martin Amis

Critique – Lionel Asbo, l’état de l’Angleterre – Martin Amis


Une espérance de vie digne des pays africains les plus pauvres, une moyenne de six enfants par femme, de préférence avec plusieurs pères différents, c’est dans cet environnement que pousse le petit Lionel. A l’âge de 3 ans, « il écopa de sa première ordonnance restrictive » pour avoir balancé des pavés sur des pare-brise. Un record national de précocité pour ce pays où la délinquance juvénile est presque un sport national. Arrivé à sa majorité, il a passé une bonne partie de sa vie devant la justice ou en prison. Et ce n’est pas fini. Pour marquer encore davantage sa marque de fabrique d’inadapté social, il troque son patronyme de « Pepperdine  » (« c’est con comme nom » dit-il) pour celui d’Asbo, acronyme d’Antisocial Behaviour Order, mesure mise en place par le gouvernement Blair pour lutter contre des délits des mineurs.

En plus de ses penchants pour le vol et les agressions physiques en tous genres, en compagnie de ses pitbulls ivres et dopés au tabasco, Lionel est du style bas du plafond et il est atteint de difficultés d’élocution qui prêtent à sourire. Sans compter que son vocabulaire est des plus réduits. Tout l’inverse de Desmond, son neveu et son cadet de six petites années dont il est le tuteur depuis la mort de sa mère (on se demande ce qui passe par la tête des services sociaux en Angleterre…). Il faut dire que la mère de Lionel, pondeuse de sept enfants, l’a eu à 12 ans !

Desmond est en effet un garçon intelligent, gentil, doué pour les études. Seule ombre au tableau : il couche avec sa grand-mère, la mère de Lionel, qui n’est âgée que de 39 ans au moment des faits !

Alors qu’il séjourne en prison, Lionel apprend qu’il vient de gagner 140 millions de livres à la loterie grâce à une grille remplie par son neveu.

Cette fortune ne va pas, bien au contraire, le faire revenir dans le droit chemin. Il sera de plus en plus odieux et refusera obstinément de partager son argent avec ses proches.

Avec « Lionel Asbo », Martin Amis, le mauvais garçon des lettres anglaises règle son compte avec humour et une certaine cruauté salvatrice aux deux pendants de la société anglaise : les prolos qui pensent que le fric va leur apporter la respectabilité et les gens de la haute qui observent d’un air dédaigneux ce nouveau riche qui ne pourra jamais leur ressembler parce qu’il lui manque deux choses : les origines et l’éducation qui va avec.

Chez la perfide Albion, la lutte des classes est toujours vivace !

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