Critique – Lake Success – Gary Shteyngart – L’Olivier

Critique – Lake Success – Gary Shteyngart – L’Olivier


C’est le visage labouré par les ongles acérés de Seema, son épouse, et de Novie, l’employée de maison, que Barry grimpe dans un car de la compagnie Greyhound à destination d’El Paso pour y retrouver Layla, son amour de jeunesse.

Ce New-Yorkais quadragénaire espère bien trouver « refuge en Amérique » et se libérer « du sombre carcan de sa propre existence » qui se résume à une femme qui ne l’aime plus, à un fils autiste, « enfant-roi au regard absent », à un superbe appartement sis à Manhattan et à un fonds spéculatif qu’il dirige mais qui est au bord de la faillite. Avant de partir, il n’oublie pas d’embarquer ses montres de luxe auxquelles il voue une passion obsessionnelle.

A la veille de l’élection présidentielle qui va porter Donald Trump au pouvoir, le « Fils du Nettoyeur de Piscines » devenu millionnaire et qui s’est rêvé écrivain va rencontrer quelques spécimens de marginaux et de déclassés. Parmi eux, un dealer avec lequel il songe à s’associer pour créer un « Fonds Urbain pour les Montres » ! Alors que Seema se consacre à son fils handicapé et prend pour amant son voisin Luis, le « Tolstoï guatémaltèque », Barry plonge dans l’Amérique profonde. Ce Gatsby des temps modernes qui essaie de rattraper le temps perdu en sortira-t-il meilleur ? C’est à cette question que répond ce formidable roman tragi-comique qui souligne combien le rêve américain est un leurre. Dans la lignée de Bret Easton Ellis, de Tom Wolfe et de Jay McInerney, Gary Shteyngart a composé un récit sur un pays qui est en train de basculer dans la vulgarité. C’est aussi, a contrario, une ode à la littérature américaine qui s’est toujours interrogée sur les travers du pays.

En suivant Barry dans son périple vers la rédemption, on s’amuse beaucoup et on est souvent ému par cet homme maladroit qui veut bien faire comme comprendre ce fils si différent de l’enfant parfait qu’il avait imaginé.

Et comme l’écrivait Francis Scott Fitzerald, « C’est ainsi que nous avançons, barques à contre-courant, sans cesse ramenés vers le passé. »

EXTRAITS

  • Barry était un républicain modéré et son père un nazi modéré.
  • Mais j’ai fait de la route, j’ai appris à connaître l’Amérique.

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